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Auteur | La Liberté |
Bessou Membre confirmé
Nous a rejoints le : 27 Oct 2002 Messages : 996 Réside à : Grand Ouest |
Libertas Praestantissimum est une lettre encyclique de Sa Sainteté le Pape Léon XIII sur la liberté humaine datée du 20 juin 1888. En voici un résumé, ou plutôt une lecture linéaire, abondante en citations (en vert ci-dessous). Résumer une telle encyclique n'est pas aisé. Mais l'essentiel se retrouve dans ce sermon de Benoît XVI sur lequel je suis tombé fortuitement:
Tout le reste découle de cette vérité essentielle que notre liberté se trouve en Dieu: La liberté, [...] apanage exclusif des êtres doués d'intelligence ou de raison, confère à l'homme une dignité en vertu de laquelle il est mis entre les mains de son conseil et devient le maître de ses actes. Le Saint Père renvoit, au sujet des libertés modernes, à ses précédents écrits notamment l'encyclique Immortale Dei. Néanmoins face à l'obstination de certain il estime nécessaire pour l'intérêt public, en face duquel Nous Nous mettons, de traiter à part cette question [de la liberté].. Liberté Naturelle La liberté naturelle [...] est la source et le principe d'où toute espèce de liberté découle d'elle-même et comme naturellement. Cette liberté, le jugement et le sens commun de tous les hommes, qui certainement est pour nous la voix de la nature, ne la reconnaissent qu'aux êtres qui ont l'usage de l'intelligence ou de la raison, et c'est en elle que consiste manifestement la cause qui nous fait considérer l'homme comme responsable de ses actes. Cette liberté, à en examiner la nature, n'est pas autre chose que la faculté de choisir entre les moyens qui conduisent à un but déterminé; en ce sens que celui qui a la faculté de choisir une chose entre plusieurs autres, celui-là est maître de ses actes. Le Pape montre ensuite que le libre arbitre est le propre de la volonté. Or la volonté n'existe pas sans la connaissance: on ne peut pas désirer un bien qui ne serait pas considéré comme tel par la raison. Etant donc admis que la liberté réside dans la volonté, [...], il s'ensuit qu'elle-même, comme la volonté, a pour objet un bien conforme à la raison. La liberté a pour objet un bien conforme à la raison. Voilà déjà une rude affirmation contre les idéologies libertaires... Néanmoins la raison peut se tromper et il arrive souvent que l'intelligence propose à la volonté un objet qui, au lieu d'une bonté réelle, n'en a que l'apparence, une ombre de bien, et que la volonté pourtant s'y applique.. Il faut ici retenir que la possibilité de faillir au bien n'est pas une perfection: Mais, de même que pouvoir se tromper et se tromper réellement est un défaut qui accuse l'absence de la perfection intégrale dans l'intelligence, ainsi s'attacher à un bien faux et trompeur, tout en étant l'indice du libre arbitre, comme la maladie l'est de la vie, constitue néanmoins un défaut de la liberté. Pareillement la volonté, par le seul fait qu'elle dépend de la raison, tombe dans un vice radical qui n'est que la corruption et l'abus de la liberté. La faculté de péché est une servitude autant ici citer entièrement le paragraphe de l'encyclique qui fait directement suite à la citation qui précède:
La liberté suppose une loi L'homme étant faible il lui faut pour protéger sa liberté des aides et des secours capables de diriger tous ses mouvements vers le bien et de les détourner du mal. les êtres qui jouissent de la liberté ont par eux-mêmes le pouvoir d'agir, d'agir de telle façon ou de telle autre, attendu que l'objet de leur volonté, ils ne le choisissent que lorsqu'est intervenu ce jugement de la raison dont Nous avons parlé. Ce jugement nous dit, non seulement ce qui est bien en soi ou ce qui est mal, mais aussi ce qui est bon et, par conséquent, à réaliser, ou ce qui est mal et, par conséquent, à éviter. C'est, en effet, la raison qui prescrit à la volonté ce qu'elle doit chercher ou ce qu'elle doit fuir, pour que l'homme puisse un jour atteindre cette fin suprême en vue de laquelle il doit accomplir tous ses actes. Or, cette ordination de la raison, voilà ce qu'on appelle la loi. Il faut refuser l'assertion suivante: L'homme, étant libre par nature, doit être exempté de toute loi car, s'il en était ainsi, il s'en suivrait qu'il est nécessaire pour la liberté de ne pas s'accorder avec la raison, quand c'est tout le contraire qui est vrai, à savoir, que l'homme doit être soumis à la loi, précisément parce qu'il est libre par nature. Ainsi donc, c'est la loi qui guide l'homme dans ses actions et c'est elle aussi qui, par la sanction des récompenses et des peines, l'attire à bien faire et le détourne du péché. La Loi Naturelle Cette loi indispensable à la liberté est l'expression de la raison éternelle du Créateur. la loi naturelle n'est autre chose que la loi éternelle, gravée chez les êtres doués de raison et les inclinant vers l'acte et la fin qui leur conviennent, et celle-ci n'est elle-même que la raison éternelle du Dieu créateur et modérateur du monde. A cette loi qui forme comme une barrière à la limite du Bien et du Mal, Dieu ajoute sa grâce qui, en éclairant l'intelligence et en inclinant sans cesse vers le bien moral la volonté salutairement raffermie et fortifiée, rend plus facile à la fois et plus sûr l'exercice de notre liberté naturelle. Mais ce secours de la grâce divine ne va pas à l'encontre de notre propre liberté. Bien au contraire, comme le remarque Saint Thomas d'Aquin: La grâce divine par là même qu'elle émane de l'auteur de la nature, est merveilleusement et naturellement apte à conserver toutes les natures individuelles et à garder à chacune son caractère, son action et son énergie. Les lois humaines et le droit naturel Ce qui précède au sujet de la liberté des individus est appliquable aux hommes unit entre eux par la société civile.
la liberté digne de ce nom ne consiste pas à faire tout ce qui nous plaît: ce serait dans l'Etat une confusion extrême, un trouble qui aboutirait à l'oppression; la liberté consiste en ce que, par le secours des lois civiles, nous puissions plus aisément vivre selon les prescriptions de la loi éternelle. Et pour ceux qui gouvernent, la liberté n'est pas le pouvoir de commander au hasard et suivant leur bon plaisir: ce serait un désordre non moins grave et souverainement pernicieux pour l'Etat; mais la force des lois humaines consiste en ce qu'on les regarde comme une dérivation de la loi éternelle et qu'il n'est aucune de leurs prescriptions qui n'y soit contenue, comme dans le principe de tout droit. (cf Saint Augustin) Dieu, but de la liberté humaine
Pouvoir légitime et illégitime Le pouvoir légitime vient de Dieu, et celui qui résiste au pouvoir, résiste à l'ordre établi de Dieu; c'est ainsi que l'obéissance acquiert une merveilleuse noblesse, puisqu'elle ne s'incline que devant la plus juste et la plus haute des autorités. Le Libéralisme La liberté des libéraux n'est qu'une pure et absurde licence affirme Léon XIII. Le libéralisme est l'application dans l'ordre civil et moral du Naturalisme et du Rationalisme. Ce dernier trouve son principe dans: la domination souveraine de la raison humaine, qui , refusant l'obéissance due à la raison divine et éternelle, et prétendant ne relever que d'elle-même, ne se reconnaît qu'elle seule pour principe suprême, source et juge de la vérité. Telle est la prétention des sectateurs du Libéralisme dont Nous avons parlé; selon eux, il n'y a dans la pratique de la vie aucune puissance divine à laquelle on soit tenu d'obéir, mais chacun est à soi-même sa propre loi. De là, procède cette morale que l'on appelle indépendante et qui, sous l'apparence de la liberté, détournant la volonté de l'observation des divins préceptes, conduit l'homme à une licence illimitée. Si chacun est à soi-même sa propre loi, alors personne n'a d'autorité sur l'homme et, par conséquent, la cause efficiente de la communauté civile et de la société doit être cherchée, non pas dans un principe extérieur ou supérieur à l'homme, mais dans la libre volonté de chacun. Ceci répugne absolument à la nature: En effet, vouloir qu'il n'y ait aucun lien entre l'homme ou la société civile et Dieu créateur et, par conséquent, suprême législateur de toutes choses, répugne absolument à la nature, et non seulement à la nature de l'homme, mais à celle de tout être créé; car tout effet est nécessairement uni par quelque lien à la cause d'où il procède; et il convient à toute nature, et il appartient à la perfection de chacune, qu'elle reste au lieu et au rang que lui assigne l'ordre naturel, c'est-à-dire que l'être inférieur se soumette et obéisse à celui qui lui est supérieur. En outre, le libéralisme va de paire avec le subjectivisme puisque le jugement du bien et du mal ne dépend que de la seule et unique raison humaine. Finalement ce qui plaît sera permis; c'est dire combien cette doctrine morale entraîne la ruine de l'autorité et prépare la voie à la domination tyrannique. Devant cette dérive dans laquelle, inévitablement, conduit le libéralisme certains libéraux reconnaissent la soumission de la liberté au droit naturel: ils professent même spontanément, qu'en s'abandonnant à de tels excès, au mépris de la vérité et de la justice, la liberté se vicie et dégénère ouvertement en licence; il faut donc qu'elle soit dirigée, gouvernée par la droite raison, et, ce qui est la conséquence, qu'elle soit soumise au droit naturel et à la loi divine et éternelle. C'est libéraux là se contredisent alors en refusant d'admettre que l'homme libre doive se soumettre aux lois qu'il plairait à Dieu de nous inspirer par une autre voie que la raison naturelle: s'il faut obéir à la volonté de Dieu législateur, puisque l'homme tout entier dépend de Dieu et doit tendre vers Dieu, il en résulte que nul ne peut mettre des bornes ou des conditions à son autorité législative, sans se mettre en opposition avec l'obéissance due à Dieu. Bien plus: si la raison humaine s'arroge assez de prétention pour vouloir déterminer quels sont les droits de Dieu et ses devoirs à elle, le respect des lois divines aura chez elle plus d'apparence que de réalité, et son jugement vaudra plus que l'autorité et la Providence divine. C'est pourquoi il est nécessaire que la règle de notre vie soit religieusement soumise à Dieu. D'autres libéraux affirment que les lois divines doivent régler la vie et la conduite des particuliers, mais non celle des Etats. Cette opinion est absurde puisque si les particuliers doivent régler leur vie sur la loi divine, la société doit donner aux citoyens les moyens et les facilités de passer leur vie selon l'honnêteté, c'est-à-dire selon les lois de Dieu. Le rôle de l'Etat est de procurer à ces citoyens les biens du dehors, mais aussi et surtout les biens de l'âme. Or, pour accroître ces biens, on ne saurait rien imaginer de plus efficace que ces lois dont Dieu est l'auteur; et c'est pour cela que ceux qui veulent, dans le gouvernement des Etats, ne tenir aucun compte des lois divines, détournent vraiment la puissance politique de son institution et de l'ordre prescrit par la nature. Il est important de remarqué que le pouvoir civil et le pouvoir sacré, bien que n'ayant pas le même but et ne marchant pas par les mêmes chemins, sont forcés de travailler ensemble puisqu'ils exercent plus d'une fois leur autorité sur les mêmes objets. Les libertés modernes Après avoir abordé la question du libéralisme, Léon XIII décrit successivement les différentes libertés modernes, c'est-à-dire les libertés que l'on donne comme des conquêtes de notre époque. La première liberté examinée par le Saint Père est la liberté des cultes, liberté qui repose sur ce principe qu'il est loisible à chacun de professer telle religion qu'il lui plaît, ou même de n'en professer aucune. Cette affirmation dénature le plus grand et le plus saint devoir de l'homme, celui qui ordonne à l'homme de rendre à Dieu un culte de piété et de religion, conséquence de la dépendance de l'homme vis-à-vis de Dieu. offrir à l'homme la liberté dont Nous parlons, c'est lui donner le pouvoir de dénaturer impunément le plus saint des devoirs, de le déserter, abandonnant le bien immuable pour se tourner vers le mal: ce qui, nous l'avons dit, n'est plus la liberté, mais une dépravation de la liberté et une servitude de l'âme sans l'abjection du péché. Il en est de même d'un point de vue social, l'Etat ne peut être athée: Envisagée au point de vue social, cette même liberté veut que l'Etat ne rende aucun culte à Dieu, ou n'autorise aucun culte public; que nulle religion ne soit préférée à l'autre, que toutes soient considérées comme ayant les mêmes droits, sans même avoir égard au peuple, lors même que ce peuple fait profession de catholicisme. Mais pour qu'il en fût ainsi, il faudrait que vraiment la communauté civile n'eût aucun devoir envers Dieu, ou qu'en ayant, elle pût impunément s'en affranchir; ce qui est également et manifestement faux. [...] C'est Dieu qui a fait l'homme pour la société et qui l'a uni à ses semblables, afin que les besoins de sa nature, auxquels ses efforts solitaires ne pourraient donner satisfaction, pussent la trouver dans l'association. C'est pourquoi la société civile, en tant que société, doit nécessairement reconnaître Dieu comme son principe et son auteur et, par conséquent, rendre à sa puissance et à son autorité l'hommage de son culte. Non, de par la justice; non, de par la raison, l'Etat ne peut être athée, ou, ce qui reviendrait à l'athéisme, être animé à l'égard de toutes les religions, comme on dit, des mêmes dispositions, et leur accorder indistinctement les mêmes droits. Par conséquent: Puisqu'il est donc nécessaire de professer une religion dans la société, il faut professer celle qui est la seule vraie et que l'on reconnaît sans peine, au moins dans les pays catholiques, aux signes de vérité dont elle porte en elle l'éclatant caractère. Cette religion, les chefs de l'Etat doivent donc la conserver et la protéger, s'ils veulent, comme ils en ont l'obligation, pourvoir prudemment et utilement aux intérêts de la communauté. Le Pape aborde ensuite la question de la liberté de Parole et de Presse. Cette liberté d'exprimer par la parole ou par la presse tout ce que l'on veut doit être justement tempérée. Cette liberté n'est pas un droit car elle ne peut pas appartenir indistinctement à la vérité et au mensonge, au bien et au mal. Le vrai est le bien peuvent se propager dans l'Etat avec une liberté prudente, mais les doctrines mensongères, les vices sont à réprimer avec sollicitude. En revanche, lorsqu'il s'agit de matières libres que Dieu a laissées aux disputes des hommes, à chacun il est permis de se former une opinion et de l'exprimer librement; la nature n'y met point d'obstacle; car une telle liberté n'a jamais conduit les hommes à opprimer la vérité, mais elle leur donne souvent une occasion de la rechercher et de la faire connaître. La Liberté d'enseignement doit être jugé de la même manière. Le devoir de ceux qui enseignent est d'extirper l'erreur des esprits et d'exposer des protections sûres à l'envahissement des fausses opinions. On ne peut donc pas, et se serait contraire à la raison, tout enseigner à sa guise. Il n'y a que la vérité [...] qui doit entrer dans les âmes, puisque c'est en elle que les natures intelligentes trouvent leur bien, leur fin, leur perfection; c'est pourquoi l'enseignement ne doit avoir pour objet que des choses vraies, et cela qu'il s'adresse aux ignorants ou aux savants, afin qu'il apporte aux uns la connaissance du vrai, que dans les autres, il l'affermisse. Il en est ainsi aussi bien que pour les vérités naturelles que pour les vérités surnaturelles entre lesquelles il ne peut y avoir de réelle opposition. L'Eglise possède un droit inviolable à la liberté d'enseigner: [...] pour la foi et la règle des moeurs, Dieu a fait participer l'Eglise à son divin magistère et lui a accordé le divin privilège de ne point connaître l'erreur. C'est pourquoi elle est la grande, la sûre maîtresse des hommes et porte en elle un inviolable droit à la liberté d'enseigner. Léon XIII parle ensuite de la liberté de conscience:
Le Pape précise: ordonner et exiger l'obéissance aux commandements n'est un droit de la puissance humaine qu'autant qu'elle n'est pas en désaccord avec la puissance divine et qu'elle se renferme dans les limites que Dieu lui a marquées. Or, quand elle donne un ordre qui est ouvertement en désaccord avec la volonté divine, elle s'écarte alors loin de ces limites et se met du même coup en conflit avec l'autorité divine: il est donc juste alors de ne pas obéir. La Tolérance Le plus vif désir de l'Eglise serait sans doute de voir pénétrer dans tous les ordres de l'Etat et y recevoir leur application ces principes chrétiens que Nous venons d'exposer sommairement. Car ils possèdent une merveilleuse efficacité pour guérir les maux du temps présent, ces maux dont on ne peut se dissimuler ni le nombre, ni la gravité, et qui sont nés, en grande partie, de ces libertés tant vantées, et où l'on avait cru voir renfermés des germes de salut et de gloire. Cette espérance a été déçue par les faits. Au lieu de fruits doux et salutaires, sont venus des fruits amers et empoisonnés. Si l'on cherche le remède, qu'on le cherche dans le rappel des saines doctrines, desquelles seules on peut attendre avec confiance la conservation de l'ordre et, par là même, la garantie de la vraie liberté. Néanmoins, dans son appréciation maternelle, l'Eglise tient compte du poids accablant de l'infirmité humaine, et elle n'ignore pas le mouvement qui entraîne à notre époque les esprits et les choses. Pour ces motifs, tout en n'accordant de droits qu'à ce qui est vrai et honnête, elle ne s'oppose pas cependant à la tolérance dont la puissance publique croit pouvoir user à l'égard de certaines choses contraires à la vérité et à la justice, en vue d'un mal plus grand à éviter ou d'un bien plus grand à obtenir ou à conserver. Ainsi, si, pour la puissance publique, tolérer un mal est licite en vue d'éviter un mal plus grand ou de conserver un bien plus grand, elle ne peut en revanche jamais l'approuver: étant de soi la privation du bien, le mal est opposé au bien commun que le législateur doit vouloir et doit défendre du mieux qu'il peut. Et en cela aussi la loi humaine doit se proposer d'imiter Dieu, qui, en laissant le mal exister dans le monde, "ne veut ni que le mal arrive, ni que le mal n'arrive pas, mais veut permettre que le mal arrive. Et cela est bon". Cette sentence du Docteur angélique contient, en une brève formule, toute la doctrine sur la tolérance du mal. La tolérance du mal appartenant aux principes de la prudence politique, doit être rigoureusement circonscrite dans les limites exigées par sa raison d'être, c'est-à-dire par le salut public. C'est pourquoi, si elle est nuisible au salut public, ou qu'elle soit pour l'Etat la cause d'un plus grand mal, la conséquence est qu'il n'est pas permis d'en user, car, dans ces conditions, la raison du bien fait défaut. Mais, si, en vue d'une condition particulière de l'Etat, l'Eglise acquiesce à certaines libertés modernes, non qu'elle les préfère en elles-mêmes, mais parce qu'elle juge expédient de les permettre, et que la situation vienne ensuite à s'améliorer, elle usera évidemment de sa liberté en employant tous les moyens, persuasion, exhortations, prières, pour remplir comme c'est son devoir, la mission qu'elle a reçue de Dieu, à savoir, de procurer aux hommes le salut éternel. La tolérance n'est pas désirable en elle-même. Mais une chose demeure toujours vraie, c'est que cette liberté, accordée indifféremment à tous et pour tous, n'est pas, comme nous l'avons souvent répété, désirable par elle-même, puisqu'il répugne à la raison que le faux et le vrai aient les mêmes droits, et, en ce qui touche la tolérance, il est étrange de voir à quel point s'éloignent de l'équité et de la prudence de l'Eglise ceux qui professent le Libéralisme Conclusion Le Pape conclut son encyclique sur la liberté humaine en récapitulant son discours, y apportant ainsi sans doute plus de clarté. Nous disons en résumé que l'homme doit nécessairement rester tout entier dans une dépendance réelle et incessante à l'égard de Dieu, et que, par conséquent, il est absolument impossible de comprendre la liberté de l'homme sans la soumission à Dieu et l'assujettissement à sa volonté. Nier cette souveraineté de Dieu et refuser de s'y soumettre, ce n'est pas la liberté, c'est abus de la liberté et révolte; et c'est précisément d'une telle disposition d'âme que se constitue et que naît le vice capital du Libéralisme. Mais il existe plusieurs espèces de libéralisme. La première et la pire consiste à refuser absolument tout obéissance [à Dieu], soit dans la vie publique, soit dans la vie privée et domestique. La deuxième espèce de libéralisme consiste, tout en reconnaissant la suprématie de Dieu et la dépendance de l'Homme vis-à-vis de l'Auteur et Maître de l'univers, à répudier les règles de foi et de morale qui, dépassant l'ordre de la nature, nous viennent de l'autorité même de Dieu, ou [à prétendre], du moins, qu'il n'y a pas à en tenir compte, surtout dans les affaires publiques de l'Etat. Cette doctrine entraîne une opinion chez certains qui voudraient entre l'Eglise et l'Etat une séparation radicale et totale. [...] ils estiment que, dans tout ce qui concerne le gouvernement de la société humaine, dans les institutions, les moeurs, les lois, les fonctions publiques, l'instruction de la jeunesse, on ne doit pas plus faire attention à l'Eglise que si elle n'existait pas; tout au plus laissent-ils aux membres individuels de la société la faculté de vaquer en particulier si cela leur plaît aux devoirs de la religion. Contre eux gardent toute leur force les arguments par lesquels Nous avons réfuté l'opinion de la séparation de l'Eglise et de l'Etat; avec cette aggravation qu'il est complètement absurde que l'Eglise soit, en même temps, respectée du citoyen et méprisée par l'Etat. D'autres, toujours au nom du Libéralisme, considèrent l'Eglise comme une simple institution de droit commun la privant ainsi de toute autorité législative, judiciaire, coercitive. Par conséquent, son pouvoir se borne à diriger par l'exhortation, la persuasion, ceux qui se soumettent à elle de leur plein gré et de leur propre vouloir. C'est ainsi que le caractère de cette divine société est dans cette théorie, complètement dénaturée, que son autorité, son magistère, en un mot, toute son action se trouve diminuée et restreinte, tandis que l'action et l'autorité du pouvoir civil est par eux exagérée jusqu'à vouloir que l'Eglise de Dieu, comme toute autre association libre, soit mise sous la dépendance et la domination de l'Etat. Pour les convaincre d'erreur, les apologistes ont employé de puissants arguments que Nous n'avons pas négligés Nous-mêmes, particulièrement dans notre encyclique Immortale Dei; et il en ressort que, par la volonté de Dieu, l'Eglise possède toutes les qualités et tous les droits qui caractérisent une société légitime supérieure et de tous points parfaite. Les derniers, tout en n'approuvant pas la séparation de l'Eglise et de l'Etat, estiment qu'il faut amener l'Eglise à céder aux circonstances, obtenir qu'elle se prête et s'accommode à ce que réclame la prudence du jour dans le gouvernement des sociétés. Opinion honnête, si on l'entend d'une certaine manière équitable d'agir, qui soit conforme à la vérité et à la justice, à savoir: que l'Eglise, en vue d'un grand bien à espérer, se montre indulgente et concède aux circonstances de temps ce qu'elle peut concéder sans violer la sainteté de sa mission. Mais il en va tout autrement des pratiques et des doctrines que l'affaissement des moeurs et les erreurs courantes ont introduites contre le droit. Aucune époque ne peut se passer de religion, de vérité, de justice: grandes et saintes choses que Dieu a mises sous la garde de l'Eglise, à qui il serait dès lors étrange de demander la dissimulation à l'égard de ce qui est faux ou injuste, ou la connivence avec ce qui peut nuire à la religion. Le Saint Père parle ensuite des attitudes à adopter envers les libertés libérales: [...] il n'est aucunement permis de demander, de défendre ou d'accorder sans discernement la liberté de la pensée, de la presse, de l'enseignement, des religions, comme autant de droits que la nature a conférés à l'homme. Si vraiment la nature les avait conférés, on aurait le droit de se soustraire à la souveraineté de Dieu, et nulle loi ne pourrait modérer la liberté humaine. [...] Car une liberté ne doit être réputée légitime qu'en tant qu'elle accroît notre faculté pour le bien; hors de là, jamais. Il précise ensuite que toute les formes de gouvernement sont acceptées par l'Eglise dans la mesure où elles sont aptes à procurer le bien des citoyens et sous la condition toutefois qu'on respecte la doctrine catholique sur l'origine et l'exercice du pouvoir public. S'ensuit la Bénédiction apostolique. NOTES Saint Augustin dit avec une grande sagesse (De lib. Arb., 1. I, c. 4, n. 15.): "Je pense que vous voyez bien aussi que, dans cette loi temporelle, il n'y a rien de juste et de légitime que les hommes ne soient allés puiser dans la loi éternelle." Supposons donc une prescription d'un pouvoir quelconque qui serait en désaccord avec les principes de la droite raison et avec les intérêts du bien public; elle n'aurait aucune force de loi, parce que ce ne serait pas une règle de justice et qu'elle écarterait les hommes du bien pour lequel la société a été formée. retour |
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