Naissance du Scoutisme Présentations des Grands Mouvements
Tout commence par l'histoire d'un homme. Enfant, il aimait jouer dans
les taillis broussailleux où il tendait des pièges à
lapins. Il apprit ainsi à ramper en silence, à reconnaître
sa route, à lire les traces, à faire du feu facilement camoufable,
à se cacher. C'est en 1900, pendant la guerre du Transvaal en Afrique du Sud , lors d'un siège qu'il eut à soutenir à MAFEKING contre les Boers (Hollandais), que notre histoire fait ses premiers pas. B.P (c'est ainsi que tous les scouts l'appellent (bi-pi)) était si démuni de soldats qu'il dut envoyer sur le front tous ceux dont il pouvait disposer. Il arpenta les rues de la ville de Mafeking, et ramassa tous les jeunes garçons désoeuvrés, qui traînaient dans les rues, pour leur confier des missions d'éclaireurs, d'estafettes. Ceux-ci s'en tirèrent fort bien, et la ville fut sauvée. Il est acclamé en héros à son retour, et des jeunes garçons lui demandèrent des conseils de vie par courrier. Il prend ces demandes au sérieux, leur répond d'abord de toujours chercher à faire une bonne action par jour à son prochain, "un bon tour". Vu l'intérêt qu'il avait éveillé chez nombre de jeunes, il tente la première expérience sérieuse du Scouting du 25 Juillet au 9 Aôut 1907 sur l'île de BROWSEA. Il y réuni des jeunes, l'aventure, et un idéal... et ça marche! Les garçon sont pourtant issus de tous les milieux sociaux... La promesse sur son honneur de faire toujours de son mieux y fut matérialisée. En 1908, Sir William Smith (fondateur des boy's brigade) lui demande d'écrire, et BP publie les bivouacs, les chapitres bimensuels d'un livre: Eclaireur. Le livre fut publié à plus d'un demi-million d'exemplaires du vivant de BP en plus des traductions faites dans plusieurs langues.A cette occasion, BP crée les 5 buts du Scoutisme (Santé, Sens du Concret, Personnalité, Service, Sens de Dieu), les 10 articles de la loi scoute, qui sont positifs, n'engendrent aucune interdiction, ne faisant que proposer au garçon une règle de vie que ce dernier promet de mettre en pratique de son mieux, et une organisation convenable (32 garçon maximum, subdivisés en patrouilles de 8). Plus tard, ils furent classé en 3 degrés pour des raisons psychologiques: louveteaux (8- 11 ans), éclaireurs (12-17), routiers (17 et +). Un mouvement se développe sans qu'il s'y attende. Devant la masse de travail qui lui est demandée de toute part (garçons, puis filles), il démissionne de l'armée en 1910. Le roi d'angleterre prend le mouvement naissant sous son patronnage: quel encouragement! Alors il travaille. Ce qu'il veut, c'est permettre au garçon de mener lui-même son bateau. Pour cela, en développant les qualités d'éclaireurs par le jeu et non par le travail, il veut donner le goût au jeune garçon d'aimer à faire les choses, au lieu d'avoir à les faire.Il espère ainsi qu'en marchant vers son maximum personnel, le garçon devenu adulte fera de même dans le service de Dieu et de sa Patrie. Concrètement, BP attire les jeunes gens (de 12 à 17 ans), les place dans la nature sous la direction d'un chef à peine plus agé qu'eux, et aprennent par eux-même, en dehors des cadres habituels et d'un esprit trop militaire à se débrouiller en copiant ce que faisaient les coureurs de steppe dans les colonies: bien connaître la nature, y survire, y dormir, y manger, tout en développant des connaissances et des dons pour servir de mieux en mieux son prochain. Ces activités se vivaient les jours de congés, dans des troupes d'une trentaine de garçons constituées en quatre patrouilles de 7 ou 8 garçons.La grande nouveauté découlait de l'acceptation d'une loi positive en 10 articles, que le jeune scout s'engageait solennellement à observer, sur l'honneur, aussi bien dans le cadre de la vie associative qu'à la maison et tous les jours.
En 1910, le scoutisme est étendu aux plus jeunes, et naissent
les louveteaux (8-11 ans). En 1916 les Guides, et
en 1917 les Routiers (17 ans et +). Et déjà
le scoutisme a franchi les mers: Chili, puis France, Scandinavie, USA. Ce sont elles qui ont réclamé leur part dans le scoutisme. BP n'avait pas d'abord pensé à elle, mais devant l'engouement que le scoutisme provoquait, il s'est réjoui de voir ces demoiselles prêtes à se lancer dans l'aventre. Puisqu'il donnait aux scouts des exemples tirés des mythes de la chevalerie, de l'indianisme, il voulut en donner aussi aux jeunes filles. Dans Girl Guiding édition, revue de 1918, BADEN- POWELL a donné les
exemples d'infirmières, de cuisinières, de blanchisseuses, d'ordonnances
et de messagères militaires, de chauffeuses d'usines ayant ainsi servi
durant la guerre de 14-18 ; ceux de jeunes femmes devant aller vivre
dans les colonies capables de se tirer d'affaire dans un environnement
sans confort et sans doute dangereux. Dans ce livre, BADEN-POWELL
narre quelques aventures de " femmes aux confins du monde civilisé
", de quoi créer l'enthousiasme ! Certains passages ne manqueront
pas d'intriguer et même d'indigner... Aux pages 47 et 48 de la 5ième
édition française (1945) nous pouvons lire l'histoire d'une femme
qui parvint à se cacher quand sa ferme fut attaquée en l'absence de
son mari. Quand les secours arrivèrent, tous les serviteurs indigènes
avaient été tués. " La seule émotion qu'elle montra fut son immense
soulagement en apprenant qu'un de ses domestiques avait tué un des
brigands qui emportait sa machine à coudre au moment où celui-ci allait
la jeter dans un puit... " II s'agit peut-être d'humour anglais !
"Permettez-moi de répéter encore que le succès dans sa carrière n'est ni le but unique
ni la suprême joie de la vie d'une jeune fille. Elle a devant elle
une récompense qui est d'autant plus douce qu'elle a été acquise par
un dur travail, la récompense glorieuse d'une union selon son cœur
et d'un foyer qui soit le sanctuaire de sa vie. Elle partagera ce
bonheur avec un mari qui sera son ami et son protecteur. Même si elle
est consciente de sa force et indépendante, c'est une joie de sentir
la protection d'un bras fort " (pages 165 et 166 de
l'édition française de 1945). Pourquoi Guide et non Scoute ? Car
comme les guides de montagne (pages 49 et 51 de l'édition française
de 1945), elle accompagne, elle aide les autres à mener à bien leurs
entreprises. Les Scouts (éclaireurs) découvrent et ouvrent la voie
aux autres ... De plus " ... une femme qui
est capable de se tirer d'affaire est respectée aussi bien par les
hommes que par les. femmes. Ils sont toujours prêts à suivre ses conseils
et son exemple, elle est leur guide ". Bien sûr, la traduction
est peut-être mauvaise ...
Comme emblême du Scoutisme, il choisit la fleur de lys, comme symbole de pureté et de paix, mais surtout parce qu'elle indique la bonne direction (le haut, la nord sur les vieilles cartes) sans tourner à droite ni à gauche. Elle est aussi dans ses armes...
Dans un monde sécularisé comme le nôtre, de plus en plus de personnes remettent en cause la place de la religion dans le scoutisme
et s'interrogent sur son origine. Avait-elle seulement été pensée par Baden-Powell ?
« Un homme n'est pas grand chose s'il ne croit pas en Dieu et n'obéit pas à Ses lois. Aussi bien, chaque Éclaireur doit-il avoir une religion »
Scouting for boys, 1908 (= Eclaireurs, répété dans le Livre des Éclaireuses, 1918, et en 1946)
« Notre but est de pratiquer la religion chrétienne dans la vie et dans les activités de chaque jour, et pas seulement de professer sa théologie le dimanche. » Scouting fot Boys, 1940, préface, répété dans la Route du succès, 1922, et dans The Scouter, 1928)
« (...)Une façon sûre d'amener [le garçon] à une prise de conscience de Dieu réellement vécue s'appuie sur l'étude de la nature et, en ce qui concerne ses devoirs de Chrétien, sur la pratique scoute de la "bonne action", etc. » Scouting for Boys, 1908, répété dans Headquaters Gazette, 1918)
« Les activités scoutes constituent le moyen par lequel le pire des voyous peut être amené à des pensées plus élevées qui feront naître en lui les éléments de la foi religieuse » Aids to ScoutMastership, 1944 (répété dans Éclaireur, 1908)
« Voici quelle est l'attitude du mouvement des Eclaireurs en ce qui concerne la religion; (...): a) Chaque Eclaireurs est censé appartenir à une religion et en suivre les cultes. b) Là où une troupe est composée de garçons adhérant à une forme de religion déterminée, on compte que le chef organisera, pour le mieux, des services et une instruction religieuse après avoir consulté l'aumônier de la troupe. c) Là où la troupe comprend des Eclaireurs de confessions différentes, on les encouragera à assister au service divin de leurs propre confession; au camp, toute espèce de prière journalière ou de culte hebdomadaire devrait être le plus simple possible, la présence de chacun étant facultative. Si le chef suit ces conseils, il ne peut commettre de grosses erreurs » Aids to ScoutMastership (=Guide du Chef Eclaireur, 1946)
« Celui qui lit Éclaireurs d’une façon superficielle pourrait regretter que la religion y tienne si peu de place. Mais pour celui qui essaye d’appliquer le contenu de ce livre, la religion, qui en fait la base, apparaît bientôt. Ce n’est pas la religion d’une Eglise ou d’une secte* particulière; mais c’est un esprit qui, sans qu’il s’en aperçoive, se saisit du jeune garçon et lui donne un christiannisme pour la vie de tous les jours et non pas seulement une religion du dimanche. Un auteur disait récemment du Scoutisme: «Comment se fait-il que les Eglises négligent un tel levier?» Eh bien, elles commencent à s’en servir maintenant. » Aids to scoutmastership
« Il est sans doute fort difficile de donner une définition précise de la formation religieuse dans notre Mouvement, car il y coexiste des confessions fort différentes. C'est la raison pour laquelle les détails de l'expression du devoir envers Dieu doivent être laissés dans une large mesure entre les mains des responsables locaux du Mouvement. Mais nous insistons sur un point: la garçon doit observer et mettre en pratique la religion qu'il professe, quelle qu'elle soit » (...) « La piété envers Dieu, le respect du prochain et le respect de soi-même en tant que serviteur de Dieu sont la base de toutes les formes de religion » Aids to ScoutmasterShip, 1944; et Eclaireurs, 1918
« On m'a demandé de décrire plus complètement ce que j'avais à l'esprit en ce qui concerne la religion quand j'ai fondé le scoutisme et le guidisme. La question qu'on m'a posée était : "en quoi la religion y entre-t-elle ?" Eh bien, ma réponse est la suivante: "Elle n'y entre pas du tout. Elle est déjà là. Elle est le facteur fondamental, sous-jacent, du scoutisme et du guidisme" » Discours à la Conférence des Commissaires scouts et guides, 1926
Il y a bien d'autres morceaux très beaux où BP s'exprime sur la religion et Dieu, et l'éducation du jeune en matière chrétienne. Des choses qui seraient même bonnes à suivre en Catéchisme ou en évangélisation pleines de sagesse.
Il explique dans un texte que "les détails de l'expression du devoir envers Dieu doivent être laisées" entre les mains des responsables locaux à cause de la diversité de confessions, en ajoutant que quelle que soit la religion choisie, elle doit être observée et mise en pratique.
Sa vision d'une présence globale et traversante de la religion dans le scoutisme se lit aussi dans sa lecture des 4 buts qu'il a donné au scoutisme :
Mais il est certain que c'est avec l'apport du Père Sevin que le scoutisme prendra une évolution religieuse encore plus prononcée, tout en conservant son "être propre", comme disait le jésuite, ferme défenseur du scoutisme comme oeuvre d'éducation globale et non seulement dédiée à la religion. BP aura d'ailleurs bien des louanges à l'égard du Père Sevin, de sa compréhension et son apport au scoutisme.
EVOLUTION DU SCOUTISME
En France quelques pasteurs protestants lancent les premières troupes d'Eclaireurs et obtiennent vite le succès. Les troupes sont formés à 75% de Jeunes Catholiques. Un pasteur remarque naïvement que par le scoutisme l'idéal de la Réforme va pénétrer les familles catholiques... Le Chanoine Cornette rencontre à Meudon les Éclaireurs rassemblés, dont les 3/4 sont catholiques. Il s'en inquiète auprès de ceux-ci et s'attire la réponse suivante d'un jeune chef de patrouille: “C'est de votre faute! Pourquoi n'y a-t-il pas de scouts catholiques !?”. Les évêques commencent par rejeter le scoutisme, car il provenait d'un anglican (fils de pasteur), militaire et général de l'armée anglaise, et prétendu issu de la franc-maçonnerie (anglaise, qui est très différente de la franc-maçonnerie française condamnée par l'Eglise). Cela s'avérera être faux (il semblerait que son frère, par contre, en était). Quelques
initiatives voient le jour cependant: En 1910 naît une troupe
d'éclaireurs de France (neutre); en 1911, les eclaireurs des
Alpes (catholiques), fondés par l'abbé d'ANDRÉIS;
une troupe d'éclaireurs Unionistes (protestants); les scouts
du mâconnais en 1912 (la Milice St Michel du Creusot, puis les
Éclaireurs Mâconnais et l'Avant Garde St Lazare à Autun), et des petits
groupes sans liens les une avec les autres, parfois non explicitement
scouts à cause du désaccord des hiérarchies. En
1911, BP envoie de Londres une Troupe de Scouts anglais en Belgique
pour aider à l'implantation du mouvement. L'année suivante,
Jean Corbisier y lance officiellement le mouvement, grâce à
l'aide du Père SEVIN. Mais
il règne une grande hétérogénéité
entre ces troupes, et elles ne sont pas encore au point au niveau scoutisme. Mais en France, la nécessité d'un mouvement vraiment catholique se fait jour, réclamée par la jeunesse. On ne veut pas faire fusionner les mouvements; comme en Angleterre, entre protestants et neutres, laissant à chaque mouvement le choix de sa religion. Le chanoine Cornette est convaincu lui aussi qu'il faut créer une fédération capable de prendre place dans l'action catholique naissante. Nous sommes en 1920, mais les discussions n'avancent pas, chaque groupuscule voulant conserver son identité. Découvrant l'action du Père Sevin, il parvient à faire imposer son point de vue sur le scoutisme catholique, et le 25 Juillet 1920 est créée la "Fédération Nationale Catholique des Scouts de France", pressée par l'annonce d'un Jamboree à Londres, premier rassemblement mondial des scouts. En 1921 fut instituée la promesse à DIEU et à l'église ( BP avait institué la promesse à Dieu et au roi). L'article 3 est modifié vers une résonnance plus chrétienne: "Servir et sauver son prochain" (au lieu de "to be useful and to help them": être utile aux autres et leur venir en aide) LE
PERE SEVIN
"Je ne sais pas ce qu'est un scout, mais je sais ce qui est scout! " En 1920, donc, le Père Sevin (grand ami de BP et jésuite, surnommé "renard noir") fonde l'association du Scoutisme Français (avec le général de Maud'huy, et le chanoine Cornette, qui est ambassadeur des scouts auprès des évêques et du Pape, et surnommé "vieux loup" , et Edouard de Macedo). Le Père Sevin reçoit l'autorisation de Baden-Powell d'organiser des camp-école d'égale valeur internationnale que celui de Mac-Laren en Angleterre (c'est dire la confiance qu'il a en lui), ce qu'il fait à CHAMARANDE. Il faut dire qu'il est l'une des rares personnalités à accepter toutes les nouveautés de la méthode de scoutisme de BP. Sa compréhension admirative du scouting fit qu'il transforma la déjà très remarquable méthode déiste de Baden Powell en un mouvement magnifié, dirigé, orienté par et vers le Christ lui-même. C'est
à cette fin qu'il a choisi pour emblème du scoutisme français
la croix potencée, qui était aussi la croix de messire Godefroy
de Bouillon ("d'argent à la croix potencée
d'or cantonnée de quatre croisettes du même", créée
pendant les croisades, à une époque où les règles
héraldiques n'étaient pas encore très établies),
général des croisés de Jérusalem. Ces
armes sont donc devenues celles de la sainte cité de Jérusalem. Il se bat, et défend vigoureusement devant les autorités ecclésiale le scoutisme. Il dément à Rome qu'il soit protestant, ni naturaliste, ni encore moins Franc-Maçon (BP l'était, à la façon déiste anglaise, mais pas le scoutisme une fois remanié par le père Sevin). Il définit un esprit scout particulier, et voit très loin. Il envisage même un monde scout, avec création d'école et entraide sociale, ordres religieux, et un des meilleurs moyens de s'opposer au socialisme (à l'époque équivalent au communisme et très anti-religion). Il fut très critiqué par ses collaborateurs (comme preque tous les saints) ce qui conduisit à son renvoi en 1933, après avoir été 10 ans mestre de camp à Chamarande. Il l'accepta avec humilité. En attendant, il avait
placé à la base de l'éducation scoute l'Amour
(aimer le jeune tel qu'il est, et pour ce qu'il est appelé à
être), la Joie (celle de l'oubli de soi, celle qui est contagieuse),
et la Confiance (comme disait BP: "même dans les pires
canailles, il y a toujours 5% de bon. Croire sur parole, et croire capable
du mieux"). Le père Sevin a également créé de nombreuses traditions joyeuses et toujours vivantes, et nombre de chants scouts qui sont repris joyeusement aujourd'hui encore. Son procès de béatification est en cours.
D'autres
hommes ont encore aidé considérablement à l'évolution
du scoutisme. Parmi eux, il y eut le Père
Doncoeur, jésuite comme le Père Sevin, qui aidé
du Père Forestier, un dominicain,
va exhumer de l'Histoire des récits gonflés d'idéal. LA IIe GUERRE MONDIALE En 1920
débutent les SdF. En 1924, le mouvement s'étend à
9 provinces. Pendant
la guerre, le scoutisme survécut clandestinement en zone occupée.
En 1940, le gouvernement de Vichy organise et subventionne le regroupement
des quatre mouvements de scoutisme en état dans la zone sud (libre),
en une Fédération du Scoutisme français qui perdure
encore aujourd'hui dans la même règlementation. Paradoxalement, le mouvement évolue en zone Nord aussi, grâce entre autre à Pierre Delsuc. Sans uniforme et avec mille ruses, le scoutisme catholique fonctionna avec sa hiérarchie et sa pédagogie ! Mais ce ne fut pas sans accidents, et des scouts attrappés le payèrent cher. En 1942, le Père Paul DONCOEUR s'intéresse au scoutisme, et surtout à la branche aînée, les routiers. Il organise pour eux un pélerinage en Août 42 au Puy, et en dépit des difficultés pour la zone Nord, près de 10 000 participants (non tous scouts) prièrent pour la libération des prisonniers et de la France.
En 1944, les équipes nationales Nord et Sud des Scouts de France peuvent se rencontrer pour la première fois depuis 1940, pour faire face à la nouvelle situation. Le chef Georges Gauthier, revenu des camps de prisonniers, accepta la lourde tâche de la direction générale en 1946. Mais après le Jamboree de la Paix tenu en France en 1947 (visité par le président de la République), il se rendit compte qu'il manquait de cadres, et s'efforça d'opérer une reprise de conscience des valeurs spirituelles telles que voulue par le Père Sevin. C'est que les "valeurs" américaines de consommation avaient pris le pas ! Michel Menu devient Commissaire éclaireurs en 1947. Malgré la croissance des effectifs, Menu constate de nombreux problèmes quand à la qualité du scoutisme dans l’association. Il lance alors la proposition Raiders-scouts, basée sur des objectifs ambitieux se reposant sur l’action des aînés de la troupe qu’il faut retenir (cette tranche d’âge se désintéressait du scoutisme). En 1953,
G. Gauthier est remplacé par Michel Rigal, élu pour
18 ans à la tête du mouvement et favorable à ces changements. François Lebouteux prends la tête du commissariat national éclaireurs et sera l’artisan d’un certains nombres de réformes. Plusieurs actions au plan national, comme «l' ENTREPRISE 62», mène petit à petit, à la spectaculaire réforme Rangers/Pionniers de 1964. Cette année là, à la Pentecôte, sur le thème "pour
un monde en voie de socialisation", sont annoncées les réformes du mouvement : nouvelle séparation des tranches d'âge, nouvel
uniforme plus voyant, fin du système des patrouilles façonné par BP (et fin du chef de patrouille), modification de la loi et des traditions
catholiques, jeu remplacé par le chantier, perte du rôle éducatif
de la nature au profit de celui de la cité.
Ces changements, comme nous le voyons, bouleversèrent la donne initiale. Certains voulaient rester fidèles au modèle unitaire, ce qui sera une des causes de l’éclatement du scoutisme catholique français. Dans les bouleversements de la société durant les années 70, la voie des Scouts de France ne fait pas l’unanimité et l’association voit ses effectifs baisser pour la première fois. Des changements ultérieurs arrêtront l'hémoragie, mais sans permettre la réunion des scoutismes catholiques. Des hommes et des femmes redécouvrent les principes du Scoutisme, et parviennent à se dégager de la tendance du moment à remplacer le chef par un spécialiste de l'éducation des garçons. Les idées de base furent lancées par un
Autrichien Frédéric
VON PERKO, en Août 1952
avec la création des Europa-scouts
en Autriche, qui pour la première fois pourraient dépasser
les frontières nationnales. Mais faute d'adaptation et de réflexion
sufisante, le mouvement ne résista pas au réel, et n'eut pas le
succès escompté (mais il survit toujours en Europe). Jean-Claude
Alain, chef d’un groupe de l’ « Association Nationale des Scouts Russes, croyait à l'idée d'un scoutisme Européen
pouvant dépasser les frontières de façon à éviter
les erreurs du passé et de la guerre. Suite au succès du BEP allemand, il fonde en Juillet
1958 l'association française des "Scouts
d'Europe", avec Jean-Pierre Roussel qui devient commissaire de l'Alsace-Lorraine. (Mais il fera scission en 1962 et créera la FSE- Alsace) Le 21 Août 1962, en Bretagne, le mouvement scout
de Perig GÉRAUD-KERAOD rejoint celui
des Scouts d'Europe. Il s'agit de la "Communauté Scoute Bleimor", qui ont rejoint depuis peu les Europa Scouts et dont Périg devient le Commissaire Général. Apportant 250 membres à l'association, il a beaucoup d'influence et va pouvoir donner à l'association une impulsion nouvelle. Il va réformer les textes, le directoire religieux, et l'ambition européenne du mouvement, lui donnant véritablement un nouveau souffle.
Les scouts d'Europe se sont donc développés parallèlement aux scouts de France, et avant la réforme de 1964. Cependant cette réforme va leur permettre de prendre leur essor, à cause du rejet que les jeunes vont en faire. La pédagogie des scoutes d'Europe réunit au sein d'une seule association les garçons et les filles, mais avec des unités et des activités distinctes. L'accent était mis sur les idéaux chevaleresques que symbolisent l'insigne de l'association et son étendard (Le baussant). En 1964 le premier camp est lancé, la première réalisation concrète de l'espoir d'un renouveau du Scoutisme de Baden-Powell.
Michel Menu avait vu d'un mauvais oeil l'évolution dramatique des Scouts de France. Il fit partie de ceux qui essayèrent au sein des Scouts de France de promouvoir l'idée de la coexistence d'un scoutisme traditionnel, qui fut baptisé « unitaire », en référence à la volonté de ne pas séparer en deux la branche éclaireur. À cet effet avait été créé en 1964 l'association "Réflexion de Scoumestres", dont faisait partie aussi le célèbre dessinateur Pierre Joubert. Cependant, la volonté des Scouts unitaires de rester au sein des Scouts de France rencontra trop d'obstacles,et en 1971 fut créée l'association des Scouts Unitaires de France (SUF) fidèle à la croix potencée du baussant des Scouts de France et à la pédagogie traditionnelle, pratiquée jusqu'aux changements de 1964 (tout comme les scouts d'Europe donc). |