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Auteur | Le mythe du héros |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Justement,
tout comme j'ai été malgré moi (inconsciemment) contraint d'inclure des héroïnes dans mon roman sans que ce soit vraiment nécessaire, j'ai inclu une part obscure à mon héros (Edeflar). Je n'y ai pas réfléchi particulièrement, je ne me suis pas demandé s'il fallait le faire ou pas, je l'ai simplement fait, sans doute parce que sinon le héros aurait eu l'air trop noble, et l'histoire trop infantile. Cependant, comme je ne trouve rien de fascinant au mal, le but de mon héros est de s'affranchir de ce côté obscur (à condition qu'il le veuille... ce qui fait qu'il vit quelque part justement le débat actuel : le héros est-il plus passionnant en conservant son côté obscur, ou en choisissant la vertu ?) Je te répondrai en disant donc que mon héros subit de plein fouet cette question de ce qu'est un héros moderne. Trop vertueux, il est disqualifié; Trop vil, il n'entre plus dans mon projet. Entre les deux, il reste à choisir ce qu'il doit devenir. C'est entre autre pour cette raison que ce sujet est sensible pour moi. (mais aussi parce que le manque se ressent dans les lectures contemporaines, où je ne trouve plus vraiment de quoi me rassasier) Mais le propos n'est pas celui d'une « nostalgie ». Juste celui d'un constat d'un manque, quelque chose qui manque aujourd'hui (et je ne suis pas certain que le public soit moins intéressé par une quête d'Idéal aujourd'hui, siècle que l'on dit plus religieux que jamais), mais surtout un constat qui disqualifie le héros qui chercherait à s'extraire du mal pour se tourner vers la vertu (comme je disais au tout début, le simple fait de créer une frontière entre le bien et le mal, même dans l'esprit ou le comportement du héros, conduit systématiquement à un jugement négatif de manichéisme, qui pousse à rejeter le récit comme infantile). |
Zero Membre confirmé
Nous a rejoints le : 12 Mars 2006 Messages : 4 713 Réside à : Ailleurs |
Je connais assez bien l'Iliade et je ne partage que moyennement vos jugements sur Achille.
Effectivement, Achille n'est pas un héros pur à la Galaad. Ça c'est la vision qu'en ont ceux qui n'ont jamais lu l'œuvre, vision nourrie par les contes pour enfants (la traduction versifiée, édulcorée et christianisée d'Houdar de la Motte, en 1714, y est pour beaucoup). Néanmoins, considérer ses aspects "bas" comme les facettes d'un héros sombre, c'est aussi tomber dans une lecture christianisée d'un livre qui n'a pas cette aune. 1 - Le héros achéen Achille est un héros. La seule définition qu'on peut en donner, c'est qu'il est "plus que". Ainsi, il est plus que nous, il est plus fort dans le combat, plus magnanime quand il l'est, plus sensible (par trois fois il pleure au long des 51 jours que dure l'Iliade), plus irritable, plus rancunier et plus prompt au pardon à la fois. Le héros grec n'est pas un "modèle" comme le sont nos héros chrétiens. Achille combat pour sa gloire. On le lui reproche beaucoup. Pourtant il importe de reconsidérer deux choses : Point de tout cela chez les grecs ! Tout nous est expliqué par Sarpédon au chant XII. Les Grecs n'ont pas d'espérance après la mort (cf l'Odyssée, cette fois) donc le bonheur consiste à avoir une chouette vie terrestre, pourvue en victuailles de bouches et autres (le bonheur des dieux est exactement celui-là). Pour ça il faut la mériter, il faut la gloire, il faut combattre. Oui, c'est aussi bassement pragmatique que ça. Hector, effectivement, combat pour sa ville et sa communauté. Ça ne l'empêche pas d'être aussi humain que les autres : il insulte son frère (chant VI), n'écoute pas les conseils prudents de Polydamas (chant VIII) et ne tue Patrocle qu'une fois que celui-ci a été sérieusement blessé par les dieux, en l'attaquant dans le dos (chant XVI) 2 - La colère d'Achille La "colère d'Achille" est l'objet même du poème, il est donc aberrant de considérer que le héros de l'Iliade est Hector et non Achille (même si, effectivement, le poème s'achève sur les funérailles d'Hector, mais sinon les premiers vers indiquent l'objet, et toute l'œuvre tourne autour du fils de Thétis, pas d'Hector). Mais cette colère n'est pas la manifestation d'un simple caprice, et si Achille reste souvent bassement humain, ce n'est pas par sa colère qu'on peut le considérer comme un héros sombre. Quelle en est la cause ? si j'en crois lambertine, c'est parce qu'Agamemnon lui a ravit sa captive et qu'il est vexé d'avoir perdu son butin. Je crois que c'est un peu court, jeune homme, et qu'on pourrait dire en somme bien d'autres choses. Si Achille regrettait simplement son butin, pourquoi rejette-t-il l'ambassade et l'offre de réconciliation d'Agamemnon qui lui promet monts et merveilles (chant IX) ? On pourrait dire que c'est à ce moment que le Péléide tombe lui-même dans l'hybris, la démesure... et dans l'orgueil. C'est une interprétation possible. Une autre interprétation est de comprendre que le rapt d'Agamemnon au chant I était une forme suprême d'injustice. Tout travail mérite salaire et tout salaire se mérite. Agamemnon s'octroie Briséis sans la mériter, en abusant d'un pouvoir qu'il ne légitime même pas par le combat ! face à l'ordre ancien des tyrans, la révolte d'Achille apparaît donc comme l'ordre nouveau des égaux ( n'oublions pas que l'Iliade est mise par écrit au milieu du Vè siècle a.C., balbutiements de la démocratie athénienne, sans doute commandée par Kimon, donc dans les années 450 aC). Un élément soutient mon avis : les dieux sont contre Agamemnon. Et les dieux, malgré leur non-exemplarité flagrante, indiquent (presque) toujours la justice. Achille, c'est pareil. Je pense que dans l'Iliade, Achille incarne le Droit. Les aspects vils de sa personnalité sont à trouver ailleurs, et ils sont souvent accompagnés de leur penchant généreux. Voyez le chant XXIV : Priam supplie Achille de lui rendre la dépouille d'Hector. Le premier réflexe d'Achille est d'inspecter le char de Priam pour évaluer la rançon qu'il apporte . C'est cupide et vénal. Quelques dizaines de vers plus loin, il fléchit généreusement en mémoire de son père : « souviens-toi de ton père » lui dit Priam pour le sensibiliser... A bien y regarder, les dieux ne sont pas mieux. Hérê est une sacrée catin au chant XIV De toutes façons, vous savez ce que disait sainte Jacqueline ( ) : Les œuvres classiques sont intemporelles et universelles parce qu'elles nous parlent de nous. Enfin, il convient aussi de rappeler qu'il n'y a pas que l'Iliade qui parle d'Achille. Bien d'autres textes nous rapportent des histoires sur ce personnages, certains perdus, d'autres conservés. Ils ne datent pas tous de la même époque, n'ont pas été écrits par le même gars, et même s'ils sont les manifestations d'une même tradition, la diversité des sources "biographies" est suffisamment importante pour ne pas restreindre Achille à l'Iliade. Ça ne répond pas directement à votre sujet, mais je tenais à apporter quelques précisions sur un personnage trop méconnu. |
Mr Isatis renard polaire
Nous a rejoints le : 10 Mai 2004 Messages : 5 554 Réside à : Paris - Menilmontant |
Citation: Moi non plus je n'ai jamais écouté ce que racontait Polydamas |
Zero Membre confirmé
Nous a rejoints le : 12 Mars 2006 Messages : 4 713 Réside à : Ailleurs |
Citation:C'est dans Cyrano Ah non ! c'est un peu court, jeune homme / On aurait pu dire - ô Dieu ! bien des choses en somme. |
lambertine Grand membre
Nous a rejoints le : 03 Juil 2006 Messages : 531 Réside à : Mons- Belgique |
C'est peut être dans Cyrano (héros lumineux, héros sombre), mais je ne suis ni jeune ni un homme malgré tout. |
Manchot Joyeux membre
Nous a rejoints le : 22 Mai 2008 Messages : 221 Réside à : Paris |
Lambertine Au risque de paraître pour un béotien (c'est le cas de le dire...) qui est Raoul de Cambrai? Merci d'éclairer ma lanterne. |
Zero Membre confirmé
Nous a rejoints le : 12 Mars 2006 Messages : 4 713 Réside à : Ailleurs |
Excuse-moi Lambertine si ça t'as ennuyé. Je le disais comme une expression.
Raoul de Cambrai, fils de Raoul Taillefer, est le héors d'une chanson de geste éponyme qui est la chanson la plus célèbre du Cycle des barons révoltés (ou Geste de Doon de Mayence). Composée dans la seconde moitié du XIIè ou au début XIIIè, c'est une histoire de rivalité féodale et de vengeances familiales. Raoul réclame l'héritage de son père, car un autre s'en est emparé lorsqu'il (Raoul) était enfant. Le roi lui promet la première terre disponible, mais ne tient pas sa promesse. Raoul entre donc en guerre contre le roi et contre les quatre fils d'Herbert de Vermandois. Il tue des gens, incendie des monastères, etc. C'est son écuyer qui le tuera (car la mère de l'écuyer est morte dans un monastère flambé) avant de mourir lui-même dans une bataille car la guerre sanglante continue même après le trépas de Raoul. Bref, son insatiable soif de vengeance et sa cupidité (déviance de son désir de justice initial) font de Raoul de Cambrai un monstre. L'an dernier j'ai majoré en littérature médiévale Dommage que ça n'ait duré qu'un semestre |
Manchot Joyeux membre
Nous a rejoints le : 22 Mai 2008 Messages : 221 Réside à : Paris |
Merci Mayeul. |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Cyrano, héros lumineux qui transcende sa difformité par son esprit (et sa fine lame). De simple champion difforme, il finit en héros aimé (où sa difformité s'efface complètement devant son héroïsme) |
Ecureuil des Innocents Guide des simples
Nous a rejoints le : 01 Mars 2009 Messages : 1 138 Réside à : Paris |
" Et je marche sans rien sur moi qui ne reluise,
empanacher d'indépendance et de franchise; ..." "Je vais vous donnez un petit coup charmant. -Poête,... - Oui, monsieur poête et tellement, Qu'en ferraillant, je vais, hop, à l'improvisade Vous composert une ballade..." "Il y a malgré vous quelque chose Que j'emporte, et ce soir, quand j'entrerai chez Dieu, Mon salut balaiera largement le seuil bleu, Quelque chose que sans un pli, sans une tache, J'emporte malgré vous, Il s'élance l'épée haute. Et c'est... - C'est...? - Mon panache." Ah!!! ca c'est de la littérature |
Fauvette Bxl Cisticolidae
Nous a rejoints le : 02 Juil 2009 Messages : 4 300 Réside à : Bruxelles |
Et si le héros n'était que le reflet de l'angoisse du temps présent, engendrant l'idéalisation de personnages du passé (et de valeurs vues comme en déliquescence) ? - C'est au 19ème siècle (période tourmentée s'il en fut) que Rostand idéalise un Cyrano qui vécut au 17ème . - Homère, sensé avoir couché par écrit l'Iliade quelques siècles après les événements qu'ils rapportent (souvenons-nous que les archéologues ont trouvé à Troie pas moins de neuf villes superposées, dont six détruites par le feu), est contemporain d'Hésiode et de sa théorie des âges : "Après l'âge d'or, il y eut l'âge d'argent, puis l'âge de fer, puis ..." - un poête chinois du 11ème siècle n'a-t-il pas écrit "se peut-il que la lune ne soit plus la même qu'hier, ni le printemps celui des jours enfuis ?" - Plus près de nous, au siècle suivant, Baloo 4AF (que l'on lit moins sur ce forum) a découvert la citation d'un prélat regrettant que "autrefois nous avions des prêtres d'or qui se contentaient de calices de bois, alors que de nos jours nous avons des prêtres de bois auxquels il faut des calices d'or" - Si l'on étudie le héros dans le cadre du roman scout ou guide, l'on obtient à peu près le même résultat : certes l'écart temporel est moindre, mais la question des valeurs, que l'on pourrait considérer en voie de perdition, hyper-présente ... |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Euh non, je ne crois pas que ce soit le sujet. Les héros peuvent agir dans les temps passés, présents ou futurs et toujours conserver pour enjeu une certaine critique de l'époque actuelle. Ce n'est pas nouveau, mais ce n'est pas non plus ce que je dénonce, pour ma part, dans la disqualification du héros lumineux. |
Ecureuil des Innocents Guide des simples
Nous a rejoints le : 01 Mars 2009 Messages : 1 138 Réside à : Paris |
Mais Zebre, honnetement, t'en a pas marre des héros à la Jean Marais? Mo je trouve le héro plus interessant quand il a un côté mystérieu ou douloureu. La personne qui est parfaite, sans défaut, gentille, sincère et honnète, entièrement completement, n'existe pas. Il faut qu'un héros soit admirable certes, mais de nos jours il faut surtout qu'il soit ordinaire, semblable à n'importe qui. Le but est qu'on puisse s'identifié à lui. En tout cas, c'est ce que j'attend d'un héro,....si il y a un peu de psychologie dans les personnage et les relations, là c'est le jackpot. J'irai même juqu'a dire qu'il n'y a plus de héro, mais des personnage principaux. Cela étant dit, j'aime les héros vertueux, mais à faible dose... disons que ca fait du bien de temps en temps. |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Je n'ai jamais dit que le héros ne devait pas avoir (au départ) des défauts.
« mais de nos jours il faut surtout qu'il soit ordinaire, semblable à n'importe qui. Le but est qu'on puisse s'identifier à lui. » Oui, c'est bien cela ce que je regrette. Le héros aujourd'hui non seulement a des défauts (comme jadis), mais il s'y complait ! Et il ne faut surtout pas qu'il change de condition, qu'il parvienne à les vaincre. Non. Il doit rester ordinaire (pour le mieux), ou nous fasciner par son côté vil (pour le pire). « J'irai même juqu'a dire qu'il n'y a plus de héro, mais des personnage principaux. » Je ne sais pas si j'irai jusque là, mais c'est en tout cas en plein dans le thème que je veux évoquer : la disparition du héros. C'est bien cela que je pleure. (et non, je n'en ai pas marre des héros à la Dumas) |
Old GIlwellian Membre honoré
Nous a rejoints le : 09 Juin 2004 Messages : 10 027 Réside à : Paris |
Ah le Stephen Dedalus de Joyce !
J'aime autant l'Inspecteur Canardo de Sokal que Blake et Mortimer de Jacobs, mais il faut dire que les deux héros britanniques sont parfois horripilants la caricature de Veys est bien plus drôle. Mais la fonction des héros est-elle de faire rire ? L'incapacité à se remettre en question, à rire de soi-même serait-elle une caractéristique du héros classique ? A moins que comme le souligne François Chevallier à propos de l'art contemporain et du mépris de soi chaque époque ait les héros qu'elle sécrète ou mérite ? |
Fauvette Bxl Cisticolidae
Nous a rejoints le : 02 Juil 2009 Messages : 4 300 Réside à : Bruxelles |
Dans la même ligne, on pourrait peut-être étudier, siècle après siècle, le profil des saints que "Rome" a décidé de porter sur les autels ; puisqu'il s'agit là aussi d'une forme d'héroïsation de modèles à suivre et donnés en exemple aux chrétiens |
lambertine Grand membre
Nous a rejoints le : 03 Juil 2006 Messages : 531 Réside à : Mons- Belgique |
Je me demande quand même s'il y en a plus qu'avant, des "héros" qui "se complaisent" dans "leur côté vil"... ou si simplement les personnages "du passé" qui s'y "complaisaient" ne sont simplement plus considérés comme des "héros", mais juste comme des "personnages" (à moins que le côté considéré comme négatif - que je préfère à "vil" - du héros à l'époque de la naissance de l'œuvre n'ait été gommé par le temps, tout bonnement parce que les mœurs ont changé - l'inverse étant vrai aussi, voir Achille). Parce que des personnages pareils, il y en a une flopée dans la fiction. Si on prend Balzac ou Zola, qu'y trouve-t-on d'autre, d'ailleurs (ou presque. Je trouve Etienne Lantier assez "lumineux" dans "Germinal")? En général, des personnages ordinaires, ni particulièrement bons, ni particulièrement mauvais. "Les héros à la Dumas" ont pour la plupart une sacrée part d'ombre ! Je ne sais s'ils "s'y complaisent", mais elle fait partie d'eux. Si je prends par exemple sa "fresque révolutionnaire" (Joseph Balsamo, Le Chevalier de Maison-Rouge, Ange Pitou, La Comtesse de Charny, L'affaire du Collier de la Reine), on peut considérer Ange Pitou et Isidore de Charny, voire Catherine - qui a en plus eu l'honneur d'être aimée par les deux - comme des héros solaires - et exemplaires. Mais les autres ? Ni Maison-Rouge, ni Balsamo, ni Billot, ni Andrée, ni Gilbert ne sont lumineux. Pas plus que Monte-Cristo. Si je prends la Comtesse de Ségur, auteur pour enfants, particulièrement catholique de surcroît, on trouve aussi chez elle des héros sombres (même si la plupart du temps ils sont convertis par un bon génie), le plus emblématique d'entre eux étant, selon moi, Gaspard. Citation: Pourquoi pas ? Mais je crois que ce sont souvent leurs défauts qui font rire. L'alcoolisme du capitaine Haddock, de Belgarath ou de Bill Ballantine, la misanthropie et l'égoïsme de Shrek ou du Dr. House, font rire avant tout. Citation: Bien sûr. Etudier quelles sont les vertus les plus mises en exergue par l'Eglise. Et aussi quels sont les Saints et les Héros du passé qui sont le plus honorés au fil des siècles et aujourd'hui (c'est sans doute parce que je suis née pendant la deuxième moitié du XXème siècle que je suis beaucoup plus sensible à la miséricorde, au pardon, ou au "témoignage", qu'à "plutôt morte que souillée - au sens sexuel", où à l'évangélisation "forcée". J'admire Ste Maria Goretti parce qu'elle a pardonné à son assassin, pas parce qu'elle a "résisté jusqu'à la mort", et je trouve l'attitude de Virginie pendant le naufrage du Saint-Géran parfaitement stupide) |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Les personnages secondaires ne sont pas, pour moi, des héros. Les saints répondent à une autre problématique que celle qui est posée ici. D'abord ne sont canonisés que les hommes héroïques disposant de l'appui d'une communauté assez fortunée pour financer un procès en béatification (donc beaucoup de saints ne sont pas officiellement proposés tels par l'Eglise, faute de pouvoir faire une enquêye déterminante) Ensuite, les saints sont tous de base des héros lumineux (qui ont dépassé leurs péchés (je n'ai pas dit anéanti)). L'orientation donnée par l'Eglise pour privilégier tel ou tel personnage soumis à son jugement répond à des problématique d'évangélisation : qui donner n exemple en fonction de l'état de la société : les moines à l'époque où le monachisme s'installait, des prêtres et des évêques, quand on en trouvait, et à l'époque où le clergé était tenté par la décadence, des laïcs aujourd'hui où la société s'est tant sécularisé. Autres problématiques que celles des auteurs de fictions, je pense. |
lambertine Grand membre
Nous a rejoints le : 03 Juil 2006 Messages : 531 Réside à : Mons- Belgique |
A part Isidore de Charny et le père Billot, je n'ai cité aucun personnage "secondaire" (et le fait d'être un personnage secondaire n'empêche pas Isidore d'être un héros solaire). Le terme de héros devrait-il être réservé aux personnages principaux ? Haddock et Ballantine ne sont peut-être pas "le" héros de l'histoire, ils n'en sont pas moins "des" héros tout court. Et quid en cas de "livre choral" ? Qui est "le" héros du Seigneur des Anneaux (ou de la Belgariade) ? Au sujet des Saints : le rapport avec la fiction, c'est qu'ils sont "ancrés dans leur époque". Qu'ils sont l'incarnation de valeurs, on seulement chrétiennes, mais de leur temps (avec tout le respect que je lui dois et que je lui porte, Saint Louis n'aurait eu aucune chance d'être canonisé pas Benoît XVI) et que c'est pour ça aussi que l'Eglise les a choisis. C'est pareil pour les héros : ils ont été créés pour représenter ces valeurs. Je ne vois pas d'écrivains contemporains (et pour moi, c'est heureux) capables de créer une Virginie qui préfère mourir noyée que d'ôter sa robe. Par contre, ils sont capables de créer un un Jake Sully, un Hiccup, une Lily Rush, un Harry Potter, un Lanfeust de Troy, un Balian d'Ibelin pour n'en citer que de très connus. Toi-même, Zèbre, tu as créé Eldeflar, et pas que lui. D'autres créent des héros "négatifs". Mais ce n'est pas nouveau. Quand Bernardin de Saint-Pierre créait Virginie, Laclos créait Merteuil. Et quand Dumas mettait d'Artagnan en scène, Balzac faisait de même avec Vautrin. |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Disons que les personnages secondaires ont moins le rôle d'exemplarité dévolu au héros. Le capitaine Haddock peut être un alcoolique notoire, cela ne gêne pas le lecteur, tant que le héros (Tintin) est vertueux... Le SdA est un exemple intéressant. Il y a effectivement dans ce roman en dehors de toutes normes un transfert du héros de Frodon vers Sam. Il est notable que pendant ce laps de temps, Sam récupère en passant toutes les vertus dévolues au héros, et cesse soudain d'être ni comique, ni léger, ni haineux, ni peureux. "La fonction fait l'homme". Je suis d'accord avec l'idée de héros en accord avec leur temps, et j'avais oublié les princes dans ma liste de figures intéressantes à canoniser. Mais il reste que la liberté de manoeuvre n'est pas la même, et que le fil directeur ne poursuit pas non plus le même but (évangéliser le bon public / plaire au public). Le lien, ténu, entre les deux est simplement une certaine adaptation au public, que je ne nie pas. Mais on ne joue pas avec les mêmes ressorts ni les mêmes enjeux. Je ne connais pas les héros que tu cites ensuite |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Tiens, il semblerait que finalement l'époque soit au retour du vrai héros (bon, évidemment, c'est pour en rire, ce qui ne fait que confirmer mon propos, mais cette sortie tombe à point nommé dans ce débat) |
lambertine Grand membre
Nous a rejoints le : 03 Juil 2006 Messages : 531 Réside à : Mons- Belgique |
Zèbre, Les héros que je cite ensuite sont des héros de séries télé (Cold Case), de films (Avatar, Dragons, Kingdom of Heaven), de livres (Harry Potter, La Belgariade), de bandes dessinées (Lanfeust de Troy), tous à grand succès. Donc le héros "chevalier sans reproche" (ou presque) à défaut d'être sans peur existe toujours et fait toujours recette. Les personnages "anciens" viennent de "Paul et Virginie" (Virginie), "Joseph Balsamo", "Ange Pitou", "Le Collier de la Reine", "La Comtesse de Charny", "Le Chevalier de Maison Rouge" (Ange Pitou, Andrée de Tavernay, Philippe de Tavernay-Maison-Rouge, Catherine Billot, son père, Gilbert, Joseph Balsamo, Isidore de Charny), Les Liaisons Dangereuses (Mme de Merteuil), "La Fortune de Gaspard" (Gaspard). "Le Père Goriot" (et autres livres de la Comédie Humaine - Vautrin ). J'espère que je n'en ai pas oublié. Le personnage "secondaire" peut être aussi exemplaire que le héros (et Haddock et Bill ne sont pas des personnages secondaires même s'ils ne sont pas des héros en titre). Quant au "Seigneur des Anneaux", je te suis quant au "passage de flambeau" de Frodon à Sam (j'ai toujours trouvé que le "Seigneur" était en fait le "roman initiatique" de Sam), mais il y a d'autres héros dans l'oeuvre (c'est d'ailleurs pour ça que je la qualifie de "livre choral"), ne serait-ce qu'Aragorn ou Faramir. Mais aussi Gandalf (tiens, n'aurais-tu pas "déboulonné" dans un certain roman la statue du "vieux magicien sage" ?). |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Harry Potter, Belgarion et Lanfeust de Troy, oui quand même, je connais. (et Virginie qu'on nous impose à l'école avec Candide !) Les personnages secondaires peuvent être héroïques, mais ils n'ont pas cette charge sur eux. Finalement cette digression est intéressante, car elle montre ce que le héros a de plus qu'eux : une responsabilité . Livre choral pour le SdA ? Oui, j'aime cette notion (normal pour un roman qui se veut une incarnation romanesque du Silmarillon, oeuvre chorale par excellence). Mais hum, broum nous dérivons vers d'anciens sujets d'anciens forums fort agréables à évoquer, mais je crains que tout le monde ici ne puisse nous suivre Est-ce que j'ai déboulonné la figure du vieux magicien sage... ? Intéressante question, ai-je vraiment conscience de l'avoir fait ? C'est vrai que j'ai créé un personnage si typique dans ce genre de roman que je me suis senti le devoir de le rendre différent, de le rendre plus détestable que mentor (aussi en prévision de sa mort). C'est aussi très moderne comme personnage. Il me rappelle (maintenant que je les ai croisé) le vieux maître japonais qui enseigne à l'héroïne dans Kill Bill, ou le docteur Cox, mentor irrascible et détestable dans Scrubs. Je plaide coupable, je suis soumis aux mêmes tensions qui me poussent à plaire à mon public en évitant les personnages stéréotypés (et trop vertueux). Mais justement, aujourd'hui le personnage stéréotypé me semble être devenu Elric, le héros aux deux faces. Sans plus laisser de place pour des héros dignes de louanges, tels que j'aurais peut-être aimé en créer, ou que j'aimerais en lire, pour m'exalter plûtôt que de me laisser médiocre. |
lambertine Grand membre
Nous a rejoints le : 03 Juil 2006 Messages : 531 Réside à : Mons- Belgique |
Je me doutais bien que tu connaissais Harry Potter et Virginie. Mais quitte à dire qui est qui, autant le faire pour tout le monde, hein !
Si j'ai cité ces personnages, c'est qu'il y a encore aujourd'hui une attirance vers les héros solaires. Le public ne demande pas des Elric. Ou, du moins, pas que des Elric. Sinon Eddings ne serait pas devenu richissime grâce à la Belgariade (Belgarion est bel et bien lui aussi un héros solaire) et Mac Gyver ne serait pas passé en boucle à la télé pendant quinze ans au moins. Mais je crois que les qualités mises en évidences chez ces héros-là ne sont pas les mêmes que celles d'un Roland (celui de la Chanson, pas celui de La Tour Sombre ). Question d'époque. La Chanson de Roland me permet d'ailleurs d'embrayer sur les personnages (pas si) secondaires (que ça). Ceux-ci peuvent être aussi, voir plus charismatiques que le Héros lui-même, et, finalement, plus que d'autres, avoir un rôle d'exemple. Une étude des registres paroissiaux de l'époque montrait l'influence (déjà !) de la fiction sur les prénoms donnés aux nouveaux-nés. Si Roland était bien placé parmi les prénoms "extra-familiaux", beaucoup plus grand était le succès... d'Olivier. Et donner à un enfant le prénom d'un héros n'est pas anodin (voir l'exemple extrême donné par Freya dans le fuseau Ondine). Olivier était donc au XIIème siècle "exemplaire" (et à raison), bien que "secondaire". (J'ai à faire, je reviens plus tard) |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Oui, cet argument des prénoms pour identifer les héros est assez intéressant. Belgarion est certes solaire, mais il date de 1982. Il n'entre pas dans ces héros modernes dont je parle. Même si je suis incapable de fixer une date, je dirai qu'il fait encore partie de l'Ancien Testament |
lambertine Grand membre
Nous a rejoints le : 03 Juil 2006 Messages : 531 Réside à : Mons- Belgique |
Oui, Belgarion date de 1982, mais ses aventures sont toujours lues (ma belle-fille est en plein dedans). Ce qui veut quand même dire que "le public" le lit toujours. Et Elric a été créé 10 ans avant lui.
J'en reviens aux "héros secondaires". Pour moi, ils sont des héros autant que "le" héros. Parce que l'auteur s'adresse à des gens, et que ces gens seront, selon leur histoire ou leur personnalité attirés ou influencés par tel ou tel personnage. J'ai parlé d'Olivier, ou de Bernier (le bâtard écuyer de Raoul de Cambrai), ou d'Hector (qui 'est effectivement pas le "héros central" de l'Iliade), mais il m'est arrivé souvent de trouver un personnage "secondaire" plus emblématique, plus exemplaire, plus touchant, plus "héroïque" que le "héros" (Beleg dans l'histoire de Turin, par exemple. Ou Vérité dans l'Assassin Royal) |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Ca, c'est le sort des personnages secondaires. Ils sont souvent beaucoup plus travaillés que le héros lui-même (Haddock, pour reprendre un cas simple, est beaucoup plus "riche" que le jeune Tintin). Et parfois même, les héros secondaires deviennent des héros à part entière (Wolwerine). C'est parfaitement normal. J'explique. Le héros principal a une responsabilité. Il doit généralement permettre au lecteur de s'identifier à lui, et il est de ce fait un héros très neutre (Harry Potter aussi bien qu'Esteban ou Luke SkyWalker et même Frodon). Dans l'archétype, il n'a pas d'opinion politique, pas de vices social, et il est assez plat. C'est souvent gênant pour le lecteur, mais c'est malheureusement le rôle de ce personnage. En revanche, l'auteur peut prendre plus de risques avec les personnages secondaires. Il peut être alcoolique, colérique, raciste même, mysogine, être ridicule ou pédant, être un personnage sans cesse amoureux d'une nouvelle fille ou avide d'or et d'argent... Les personnages secondaires (principaux) sont toujours, je trouve plus riches que le héros. En revanche ils prennent plus de risque de déplaire. Peu importe, on choisit le personage secondaire qui nous plait, et on rejette celui qui ne nous plait pas. Le héros n'a pas cette liberté. (je dois y aller aussi) |
lambertine Grand membre
Nous a rejoints le : 03 Juil 2006 Messages : 531 Réside à : Mons- Belgique |
Si ça vous intéresse (on y parle essentiellement de fantasy, mais le débat et les articles en lien rejoignent ce débat-ci) http://www.elbakin.net/forum/viewtopic.php?id=6795&p=1 |
technique | |
bonne humeur |