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Auteur | L'EUTHANASIE: on cherche à l'imposer |
Mr Isatis renard polaire
Nous a rejoints le : 10 Mai 2004 Messages : 5 554 Réside à : Paris - Menilmontant |
C'est déjà fait, et il me semble que là aussi on considère que le corps n'appartient pas à son propriétaire: la preuve, ils sont recyclés.
Il me semble également qu'un des slogans nazi était : "ton corps appartient à ta nation" ou "ton corps appartient à ton fuhrer". Voilà le genre de dérive que je craint, à partir du moment où l'on décrète que l'individu n'est pas maître de son corps. [ Ce Message a été édité par: Isatis44 le 23-02-2005 15:09 ] |
Af' Le Loup Membre confirmé
Nous a rejoints le : 03 Juil 2004 Messages : 3 870 Réside à : 92 et ... 29 |
Respecter le corps comme "propriété privée" n'implique pas l'obligation d'agir sur lui pour précipiter la mort. Il faudrait aussi respecter la liberté de conscience du personnel médical. Désolé, mais c'est trop facile pour les autres de se dédouaner de la responsabilité de l'acte fatal en obligeant médecins et infirmières à faire le sale boulot pour soulager leur conscience. Et qui va soulager celle du personnel médical?
Af' |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Là Isatis tu pousses un peu.
Oser comparer le fait de ne pas se prétendre maître de sa vie au nazisme relève d'une pirouette réthorique aussi compliquée qu'absurde (mais la réthorique se moque de l'intelligence, n'est-ce pas ?) En quoi es-tu maître de la vie, et de ta vie (au sens de souffle de vie) ? Tu n'a pas décidé de naître, tu n'as pas choisi tes parents ni ton pays. Tu ne peux choisir ta mort non plus, car c'est alors rendre à Dieu le cadeau qu'il t'a fait : la vie. S'il te l'a donné, c'est qu'il y voit un dessein important, et la lui jeter à la figure est une grave offense. Maintenant, si tu ne crois pas, aucune raison scientifique ne peut t'empêcher de te suicider (et Hegel était expert pour pousser ses étudiants au suicide), mais si on y réfléchi au plan psychologique ou sociologique, on découvre que presque toujours le suicide est une mauvais eréponse à une détresse à laquelle l'homme a les moyens de répondre, s'il se retrousse les manches. Le suicide d'un proche nous concerne malheureusement, y compris une euthanasie. Avons-nous su lui montrer que nous l'aimions, ou ne l'avons-nous pas déprécié parce qu'il était impotent ! Le vrai message de la foi n'est pas "il est interdit de...", mais "il faut aimer" (et en vérité; c'est bien difficile) |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
par contre, nous sommes d'accord pour dire que tu es mâitre de ta vie au sens de destin, de ce que tu feras de la vie que tu as reçu. C'est la notre responsabilité, quoique nous ne maîtrisions pas tout non plus |
Amodeba Bretagne
Nous a rejoints le : 06 Sept 2004 Messages : 4 687 Réside à : Bzh |
Entièrement d'accord avec Zèbre.
Isatis, le problème de l'euthanasie est que bien souvent justement, la personne sera "obligée" de faire appel à du personnel médical, ceci pour obtenir une mort "douce"... Or, il s'agit de tuer, quoi qu'on mette cela sous le terme euthanasie. En outre, les personnes qui sont en fin de vie, en soins palliatifs ne désirent que rarement la mort. Personnellement, en tant que future infirmière, si un de mes patients me demandait de mourir, je ME remettrais en question avant toute chose, savoir pourquoi il le veut, lui parler, etc... Il est très rare que, lorsqu'on fait preuve de compassion envers la personne, elle continue dans cette voie. De plus, il est très facile d'adhérer à l'ADMD (association pour le droit à mourir dans la dignité) alors qu'on est en pleine santé. Qui dit que par la suite, il en fera partie alors qu'il sera en fin de vie ? On parle là de choses auxquelles on n'est guère confronté personnellement. Une personne de mon entourage vit une fin de vie très difficile ; parfois, il est vrai, je me demande si sa vie vaut la peine d'être vécue... Mais je vois avant tout en elle l'être humain. Si l'on regarde la personne en fin de vie comme une personne vivante, et non comme une personne qui a déjà le pied dans la tombe, je doute qu'elle demande à mourir. Amodeba |
Mr Isatis renard polaire
Nous a rejoints le : 10 Mai 2004 Messages : 5 554 Réside à : Paris - Menilmontant |
Tu oublie une chose Zèbre: Dans mon cas personnel, je ne considère pas que Dieu m'est fait un cadeau, puisque je ne crois pas en son existence. Je ne vois pas pourquoi j'appliquerai un principe religieu sur ma vie alors que je n'ai pas de religion. |
Baloo15 Grand membre
Nous a rejoints le : 22 Fév 2005 Messages : 607 Réside à : Nantes-Versailles |
Quand une opinion publique et un juge peuvent décider de la vie ou de la mort d'une personne innocente :
http://www.lefigaro.fr/international/20050323.FIG0412.html Citation: Je note que contrairement à un argument très fréquent chez les pro-euthanasie, la justice (américaine) peut passer outre la volonté des parents et des proches. [ Ce Message a été édité par: Baloo15 le 23-03-2005 21:10 ] |
Amodeba Bretagne
Nous a rejoints le : 06 Sept 2004 Messages : 4 687 Réside à : Bzh |
C'est extrêmement délicat... Je pense, en tant que future professionnelle de la santé, catholique, qu'il est extrêmement difficile de se faire son opinion. Encore une fois, ne s'agit-il pas d'un matraquage médiatique montrant une personne, dans un cas particulier, pour faire passer une loi ?
Je ne me reconnais nullement le droit de trancher. Je note quand même que la personne est dans le coma depuis 15 ans... Sait-on à la suite de quel traumatisme elle est dans le coma ? A la lecture de l'article, j'ai l'impression qu'on a affaire à une histoire d'acharnement thérapeutique (15 ans dans le coma tout de même...). Il nous faudrait d'autres éléments pour nous faire une meilleure idée de la situation. N'oublions pas que la mort fait partie de la vie : c'est le seul évènement dont nous sommes certains qu'il va survenir. Il convient donc de s'y préparer, et d'accompagner au mieux les personnes en fin de vie. Amodeba |
Baloo15 Grand membre
Nous a rejoints le : 22 Fév 2005 Messages : 607 Réside à : Nantes-Versailles |
Il ne s'agit pas ici d'acharnement thérapeutique, on ne la laisse pas mourir en lui refusant des médicaments, par exemple, la nuance est qu'on refuse de l'alimenter : les médecins vont donc la faire mourir de soif (et non de maladie). Pour moi, c'est dans ce genre de nuances que se situe tout le débat sur l'euthanasie.
Je reconnais que nous sommes quand même dans un cas extrème, le fait que Terri soit dans le coma depuis 15 ans m'avait échappé. Sur la forme, je regrette que les journaux américains utilisent des sondages pour en déduire ce qui est moral et ce qui ne l'est pas. Je regrette également que sur une question aussi grave, un juge puisse "jouer la montre" avant qu'un juge fédéral ait pu trancher. |
léopard Leopard
Nous a rejoints le : 04 Juin 2003 Messages : 960 Réside à : Paname!! |
D'après ce que j'ai compris, elle a subi une crise qui a privé son cerveau d'oxygène pendant une periode qui a fait que la plupart de ses cellules sont mortes. Ainsi, elle est dans le coma, voire plus,elle est en état de mort cérébrale et ce, depuis 15 ans. un legume quoi..
le fait de maintenir un corps en vie comme ça, je me demande vraiment à quoi ca sert.. |
Amodeba Bretagne
Nous a rejoints le : 06 Sept 2004 Messages : 4 687 Réside à : Bzh |
ce n'est pas très clair, ton message, Baloo15...
On ne lui refuse pas de médicaments, mais on refuse de l'alimenter Les soins palliatifs consistent, faut-il le rappeler, à accompagner la personne en fin de vie jusqu'à sa mort naturelle. Il s'agit de lui procurer tout le confort physique et moral possible, et de suppléer à ses besoins fondamentaux : manger et boire, respirer, dormir... Il s'agit aussi de traiter les symptômes désagréables : insomnie, douleur, nausées/vomissements, escarres... Or la prévention des escarres passe aussi par l'alimentation. Voilà pourquoi je suis étonnée... L'acharnement thérapeutique consiste à vouloir tout tenter pour guérir ou sauver le patient, alors qu'il est effectivement en fin de vie. Ca c'est la théorie. En pratique, il est tout de même extrêmement délicat de juger où commence l'acharnement thérapeutique... Et c'est pourquoi je ne saurais trancher dans la situation précise qui nous a été rapportée. Amodeba |
Appaloosa Membre confirmé
Nous a rejoints le : 06 Mai 2004 Messages : 2 757 Réside à : Toulouse |
ce qu'on fait sur cette pauvre femme , c'est de l'acharnement thérapeutique... et je pousserais jusqu'à dire de l'égoïsme de la part de ses parents! |
Baloo15 Grand membre
Nous a rejoints le : 22 Fév 2005 Messages : 607 Réside à : Nantes-Versailles |
Citation: Je reconnais m'être un peu embrouillé : je veux simplement dire que je ne suis pas catégorique ; on est dans un cas "limite". Je trouve simplement que la méthode employée est assez barbare puisqu'on ne la nourrit plus (des manifestantes se sont fait arrêtées alors qu'elles cherchaient à lui donner à boire). Ce que j'aimerai simplement savoir, c'est si cette femme a des chances de s'en sortir. S'il n'y en a aucune, alors je suis d'accord avec Léopard, autant la laisser mourir, mais encore une fois, pas de soif! |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
la seule chose qui m'a vraiment étonné dans cette histoire, c'est qu'elle a déjà été débranché pendant 9 jours il y a 5 ans, et qu'elle survécu, alors les médecins l'ont rebranché.
J'ai du mal à concevoir qu'une personne puisse survivre 9 jours dans son état sans aucun apport de nourriture ou d'eau. Baloo, il ne s'agit ici certainement pas d'euthanasie. On ne meurt pas toujours tué par quelque chose. La mort de vieillesse, c'est aussi un épuisement du corps, qui fait qu'il n'est plsu capable de se subvenir à lui-même. La mort n'est pas toujours à envisager comme violente (arrêt cardiaque, attaque virale...). Cette femme est comme morte depuis 15 ans. Tu imagines la vie de son mari, qui ne peut pas se remarier s'il décide de vivre son engagement en vérité, de ses enfants ? Et la vie même de cette femme, prisonnière malgré elle d'un corps déjà mort. 15 ans, c'est énorme ! Il ne s'agit pas de faire mourir quelqu'un en le privant d'eau (comme on le priverait do'xygène), il s'agit de cesser de maintenir artificiellement cette personne en vie... de se prendre pour maître de la vie. C'est comme si tu faisais un masage cardiaque à un mort en refusant d'arrêter parce que tant que tu masses, le coeur bat (sauf qu'évidemment, la notion de mort cérébrale n'entre pas en compte) |
Baloo15 Grand membre
Nous a rejoints le : 22 Fév 2005 Messages : 607 Réside à : Nantes-Versailles |
Citation: Non Zebre, tu m'as bien lu : il s'agit bien de cesser d'hydrater et de nourrir un patient. http://www.catholique.org/news-68415.php |
Orque J. Cétacé
Nous a rejoints le : 29 Mars 2005 Messages : 75 Réside à : Brest |
Le débat sur l'euthanasie est sûrement des plus complexes, mais il me semble important de souligner qu'avant de légiférer sur ce sujet, il serait bon de traiter des limites à imposer à une thérapeutique pour ne pas glisser dans l'acharnement, ce qui permettrait d'éviter à mon avis pas mal de cas d'exemples possibles d'euthanasies.
En effet, la technologie permet désormais de maintenir en vie des personnes à l'extrème limite de la vie, voir de les arracher à la mort. On vol de plus en plus une mort naturelle aux patients. - D'une part parceque ces mêmes personnes et souvent leur familles, ne croyant plus en rien et encore moins à l'au delà s'accrochent aux miettes de leur présents avec les ongles. Cet argument semble contradictoire avec la notion d'euthanasie, mais je ne pense pas qu'il le soit tant que celà: ce sont ces mêmes personnes qui regrettent ensuite de devoir vivre plusieurs années dans un lit en légume, par exemple, et demandent alors l'euthanasie. - D'autre part, les médecins qui croient peut-être trop souvent que ne pas sauver de la mort un patient est un échec, et qui maintiennent à tout prix ,ce qu'ils voient parfois (car c'est, je l'espère, loin d'être le cas de tous) comme un tas d'organes, en acctivité fonctionnelle le plus longtemps possible. Ils oublient alors que le rôle du médecin est aussi d'accompagner vers la mort, et de soulager. Phrase à méditer : Le catheter et les tubulures ont remplacés l'extrème-onction.... Pour finir, je donnerais juste un exemple qui m'est cher : celui de mon grand-père. Il a subit une attaque cérébrale. En 6 mois, son état général s'est dégradé jusqu'à ce qu'il devienne paralysé, aveugle et muet. Ses dernières paroles ont été "laissez moi mourrir en paix". 9 mois après son accident, il ne pouvait plus se nourrir per os (par la bouche), et une sonde naso-gastrique lui a été posée. Sans cette dernière, mon grand-père mourrait donc 9 moi après le drame. Il est allongé sur son lit depuis maintenant 10 ans, et peut vivre encore très longtemps comme ça. D'un point de vue médico-légal, le médecin est à 100 pour cent dans ses torts, puisqu'il est censé recueillire le consentement express du malade avant toute mise en place d'une thérapeuthique, et mon grand-père avait bien émit le souhait qu'on le laisse mourrir. Mais peut-on blâmer le médecin? Quelle désicion difficile à prendre! Et une foi cette sonde posée, la retirer serait par contre un geste d'euthanasie. |
Choc 013 Membre confirmé
Nous a rejoints le : 02 Oct 2003 Messages : 1 425 Réside à : forêt de Brocéliande |
Merci de ton témoignage, et
(mais dis donc, tu es de veille ? Il faut aussi dormir la nuit ) |
Amodeba Bretagne
Nous a rejoints le : 06 Sept 2004 Messages : 4 687 Réside à : Bzh |
La question de l'alimentation d'une personne en fin de vie est extrêmement délicate... Accompagner une personne en fin de vie suppose de lui proposer un confort physique et psychologique le meilleur possible.
Ne pas alimenter une personne en fin de vie peut provoquer des escarres importants et douloureux (notamment pour les pansements). Ensuite il faut trouver le juste milieu... Non, ce n'est pas toujours simple... Par ailleurs je rejoins Orque J dans son analyse. Amodeba |
ADVITAM Membre confirmé
Nous a rejoints le : 14 Fév 2005 Messages : 1 908 |
Jean Paul II a montré par son exemple les limites qu'il acceptait pour l'acharnement therapeutique
il n'a pas souhaité retourné en clinique |
Amodeba Bretagne
Nous a rejoints le : 06 Sept 2004 Messages : 4 687 Réside à : Bzh |
C'est un exemple, mais ce n'est certainement pas la seule réponse possible. Les soins palliatifs me semblent une bonne alternative. Et puis tout le monde ne peut pas forcément se permettre d'avoir un médecin à proximité. Il n'a peut-être pas souhaité se faire réopérer, mais il aurait très bien pu se faire qu'il meure à l'hôpital. Le principal, pour moi, c'est qu'il soit décédé dans les conditions qu'il a voulues.
Amodeba |
Gage Membre actif
Nous a rejoints le : 23 Janv 2007 Messages : 98 Réside à : Sèvres |
Gage va farfouiller dans sa malle à matos, sort une pelle-bêche, et commence à déterrer un très vieux fuseau...
À l'occasion des nombreux débats ayant lieu en ce moment, une association dont j'ai oublié le nom a jugé bon de demander aux candidats à une grande élection nationale de s'exprimer sur l'euthanasie et sa légalisation. Je souhaite réagir à ce qui apparaît comme une prise de position forcée, basée sur le manque d'information plus que sur le "choix libre et éclairé" qu'on peut exiger du citoyen quand il vote. Pour commencer, il faut bien distinguer euthanasie et acharnement thérapeutique. Si l'euthanasie est l'acte de donner la mort à une personne avec son consentement explicite, l'acharnement thérapeutique est celui d'arrêter, d'une part les soins, d'autre part le maintien en vie, d'une personne n'étant pas en mesure de consentir et n'ayant aucune chance de voir son état s'améliorer, dans le coma. Je vais commencer par l'acharnement thérapeutique, qui porte plus à consensus : il est, en général, à éviter. S'il n'est pas question de laisser mourir un patient qui demande à vivre, il est généralement préférable de laisser mourir un patient qui a perdu toute autonomie, se trouve dans le coma et n'a aucun espoir de réveil ou très faible. On vous parlera bien de tel homme ou telle jeune fille réveillée après 10 ans de coma, c'est une personne sur 10 000... Il existe des signes qui indiquent au médecin qu'un coma est irréversible, et on sait aujourd'hui pronostiquer avec une grande précision les futurs réveils. Ce n'est donc pas tuer que de "débrancher" un patient dans le coma : c'est laisser faire un processus inexorable et irréversible. Se pose en revanche le problème de l'euthanasie. Je n'y irai pas par 4 chemins : je suis contre l'euthanasie. Cependant, j'invite le sieur Isatis, qui a fait remarquer qu'il considérait l'opposition à l'euthanasie comme "révélatrice de quelque chose d'extrêmement dangereux", à s'intéresser à ma réponse, parce qu'elle n'est pas basée sur un argumentaire religieux. Avant de s'intéresser aux cas de patients se plaignant de la perte de leur dignité, intéressons-nous aux demandes d'euthanasies en elles-mêmes. On constate, si l'on creuse, qu'elle proviennent à 99% de patients souffrant de pathologies incurables (évidemment), mais surtout caractérisées par une très grande douleur. La quasi-totalité des demandes d'euthanasie proviennent de patients qui ne supportent plus la douleur et demandent à mourir puisque "leur état ne peut pas s'arranger". Le personnel soignant pense alors à leur accorder ce qu'ils demandent : la mort. Il existe cependant une solution à la grande majorité des douleurs d'origine corporelle : elle est connue depuis une centaine d'années, il s'agit de la morphine. La France est un des pays européens où l'on prescrit le moins de morphine par habitant, alors qu'on n'y souffre pas moins que dans un autre pays. Les médecins restent à l'ancienne conception qui prévalait il y a quelque temps : Primum non nocere. D'abord ne pas nuire. Et donc, la morphine étant quand même un produit à risque, car il déprime les centres nerveux respiratoires, conduisant à des arrêts respiratoires, on ne prescrit pas de morphine. Quitte, par la suite, à admettre son échec en disant "Ce patient ne peut plus vivre comme ça, tuons-le". Des études ont été effectuées, montrant qu'une prise en charge adaptée de la douleur réduisait à quasiment zéro les demandes d'euthanasie. Je pose donc la question : on peut permettre au patient de retrouver une vie acceptable, même si il ne le sait pas (les patients ne pensent pas toujours qu'on peut traiter la douleur), est-ce vraiment lui rendre service que d'accéder à sa demande de mise à mort ? Alors, il y a des cas qui défraient la chronique, comme celui, récent, de Vincent Humbert : disons-le tout de suite, ces cas n'ont rien à voir avec le débat sur l'euthanasie. Pourquoi ? Parce que ces cas représentent au plus 1% des demandes d'euthanasie. Il sont simplement plus exposés médiatiquement parce que plus spectaculaires. Alors peut-être fallait-il effectivement euthanasier Vincent Humbert. Par contre, si on euthanasie un Vincent Humbert, on prend le risque d'euthanasier 99 grand-mères cancéreuses, qui auraient pu vivre quelques mois ou années de plus de façon tout à fait acceptable. C'est pourquoi je m'oppose à la légalisation de l'euthanasie : c'est la solution la plus facile pour tout le monde, mais pas la meilleure pour le patient. Pour ce qui est de l'argument de la vie comme don de Dieu, voici mon opinion : L'argument religieux est parfaitement recevable à l'échelle d'un individu. L'individu fait des choix en son âme et conscience et Dieu a donné à l'individu la liberté de choix. Le catholique pratiquant ne choisira donc pas, personnellement, la voie de l'euthanasie, si l'Église s'y oppose. Très bien. Par contre, au niveau de la législation, c'est un peu plus complexe : Dieu a, selon la connaissance que j'en ai à la lecture de ce forum, donné la liberté à l'homme. Cette liberté est celle de résister à la tentation, ou d'y céder. S'il y cède, il tombe dans le péché. S'il y résiste, il ne tombe pas (encore) dans le péché. Mais pour permettre ce choix, il faut qu'il y ait tentation. C'est-à-dire que l'individu doit résister à la tentation, non parce que la tentation ne s'est pas présentée, mais bien parce qu'il est plus fort que le Malin. Jésus, quand il est allé dans le désert, savait parfaitement ce qui l'y attendait. A-t-il choisi de l'éviter ? Non, au contraire, il va vers la tentation pour mieux y résister. Il n'y a aucune grandeur à ne pas être tenté, par contre, résister à la tentation, voilà qui est digne de louanges. C'est pourquoi, selon moi, de façon assez paradoxale, un argumentaire religieux devrait être : "La loi doit permettre l'euthanasie, les hommes doivent la refuser." Car si la loi interdit la tentation, il n'y a plus de mérite à y résister. Après, je m'y connais assez peu en textes religieux, donc n'hésitez pas à contre-argumenter . Après, j'admets que ça doit être déconcertant de lire, d'une part, que, pour des raisons tout à fait non religieuses (l'homme n'est pas libre : il décide en fonction de son état, ici de sa douleur), il faille interdire l'euthanasie, et d'autre part qu'un raisonnement religieux devrait pousser à la dépénalisation de l'euthanasie. N'y voyez pas un simple jeu rhétorique, il s'agit bien de ma conviction profonde : l'euthanasie ne doit pas être légalisée, mais l'Église n'est pas cohérente en prônant son interdiction légale. |
CASTORE Rongeur
Nous a rejoints le : 08 Fév 2005 Messages : 3 258 Réside à : wwwest |
Bon, juste pour remettre les pendules à l'heure sur la fin de ton post :
*la loi ne doit pas interdire l'inceste, il faut juste résister à la tentation *la loi doit permettre l'extermination en camp de concentration, il faut juste resister à la tentation... et je peux continuer comme cela longtemps. Si la loi doit interdire l'euthanasie, c'est au nom de la conception que notre société a de la dignité humaine, tout simplement.Comme tu le dis toi m^me, 99 vieilles pour un Vincent Humbert... La loi dicte la règle, la jurisprudence adapte aux cas concrets.Une loi ne doit pas se fonder sur des exceptions, c'est aller contre le bien commun NB: compter sur ses forces pour résister à la tentation, c'est aller à l'échec |
sarigue Didelphidé
Nous a rejoints le : 04 Janv 2004 Messages : 5 895 Réside à : Vie à Rueil-Malmaison, Scout ailleurs |
Très intéressant tout ça...
Je me permettrais juste quelques remarques: >>"Ce n'est donc pas tuer que de "débrancher" un patient dans le coma : c'est laisser faire un processus inexorable et irréversible." J'aurais rajouté: "et naturel"... >>"Il existe cependant une solution à la grande majorité des douleurs d'origine corporelle : elle est connue depuis une centaine d'années, il s'agit de la morphine." Je ne voudrais surtout pas contredire un noble étudiant en médecine donc certainement mieux calé que moi dans ce domaine, mais... Il me semble que dans certains cas, la douleur est tellement forte que même à dose maximale, la morphine ne l'empêche pas suffisament, et que le patient souffre toujours... (lire la suite avant de répondre à ce point) Par ailleurs, comme tu le précises, c'est une solution aux douleurs corporelles... Mais il n'y a pas que les douleurs corporelles! (mais là, on tombe dans un débat politique: il faudrais mieux former le personnel soignant, et faire en sorte qu'il puisse passer plus de temps avec les patients, donc, il faudrais plus de personnel... Et l'on retombe dans l'éternel problème du nombre de médecins, infirmiers et autres personnels soignant...) >>"Alors, il y a des cas qui défraient la chronique, comme celui, récent, de Vincent Humbert : disons-le tout de suite, ces cas n'ont rien à voir avec le débat sur l'euthanasie. Pourquoi ? Parce que ces cas représentent au plus 1% des demandes d'euthanasie." Entièrement d'accord. Dans ce cas, si on veut une loi, il faut écrire dans la loi que ce genre de cas (comme le cas du patient sous morphine mais qui souffre toujours, et c'est là la suite en question du point précédednt) doit être traité au cas par cas... Dans un débat télévisé ("l'Arène de France") sur la question, un invité avait eu une remarque qui m'a paru juste: euthanasier "activement" quelqu'un, c'est faire une chose a-priori interdite. Donc, c'est aller devant un tribunal pour s'expliquer. Le peuple (ses représentant) jugent alors l'acte en tenant compte des conditions dans lequel il a été réaliser. C'est donc en quelque sorte bel et bien un traitement "au cas par cas", et on peut donc laisser les choses ainsi... Seulement, ce qu'on dit moins et ce qui, je pense, gène, c'est qu'on retombe dans des problèmes très concrets et très terre à terre: ce genre de cas, ça encombre encore un peu plus les tribunaux... Bref, la solution qui, il me semble, est la plus juste est d'une part, de ne pas faire d'acharnement thérapeutique (sans pour autant "débrancher" et "laisser mourir" sans autre soins) et d'autre part, d'autoriser à donner des produits pour atténuer les souffrances, même si ces produits accélèrent la mort (c'est donc "débrancher" ET accompagner et non "laisser mourir") Gage, l'Eglise est parfaitement cohérente: admettre la légalisation de l'euthanasie, c'est quelque part cautionner l'euthanasie. l'Eglise demande de résister à la tentation de la légalisation, qui serait la tentation de la facilité: on tue, et on s'en débarrasse... Lors de l'émission "l'Arène de France" sur l'euthanasie, il y avait un reportage qui m'a fait froid dans le dos: dans je-ne-sais-plus-quel-pays, il est possible... de choisir la date de sa mort!! Et l'on voyait un brave type -en apparence en pleine forme, mais dont on apprenais qu'il souffrait d'un truc (je ne sais plus quoi) irréversible et causant la mort (avec risque de souffrances) à court terme- face à quelqu'un d'une société d'euthanasie (!) prendre son agenda et fixer la date de sa mort !!!! |
sarigue Didelphidé
Nous a rejoints le : 04 Janv 2004 Messages : 5 895 Réside à : Vie à Rueil-Malmaison, Scout ailleurs |
Castore: oui, une société bien faite et morale n'aurait effectivement pas besoin de loi écrites. Pas de code de la route, pas d'interdictions ni d'obligation. Chacun saurait ce qu'il a à faire. Ensuite, à chacun d'agir en son âme et conscience...
D'ailleurs, l'interdiction de meurtre ne l'a jamais empêché... Gage: ...Par contre, la loi permet de fixer des peines (maximales). Les mêmes pour tous. Elles permet donc de coucher sur le papier l'égalité. |
CASTORE Rongeur
Nous a rejoints le : 08 Fév 2005 Messages : 3 258 Réside à : wwwest |
Je dis seulement la m^me chose que toi : La loi n'est pas faite pour l'exception, c'est la jurisprudence (= jugement d'un tribunal) qui doit traiter de l'exception. Par exemple, il est interdit de tuer.La jurisprudence, elle, a déterminé la notion de légitime défense. et encore nous ne sommes pas en Angleterre, où la jurisprudence a une place plus importante qu'en France où nous avons la manie de légiférer Je vous signale que le dernier procès en date (Tramois and c°) a eu lieu pour des faits datant d'avant la nouvelle législation sur le droit des malades à refuser des soins et l'acharnement thérapeutique. Dans ce cas précis, cette loi (22 avril 2005)ne change pas grand chose, parce qu'il s'agit bien d'un geste d'euthanasie (la piqure létale) Par contre, cette nouvelle loi permet d'éviter l'acharnement thérapeutique et dédouane les soignants des conséquences "secondaires" des piqures de morphine. Aujourd'hui, on assiste bel et bien à une offensive en règle en faveur de l'euthanasie par la douteuse association ADMD, alors que la Loi vient de clarifier le sujet pour la plupart des cas. |
Gage Membre actif
Nous a rejoints le : 23 Janv 2007 Messages : 98 Réside à : Sèvres |
Citation:En fait, j'ai hésité à citer l'avortement : la loi doit permettre l'avortement, il s'agit de résister à la tentation après... Je ne l'ai pas fait pour deux raisons : un, ç'aurait été trop polémique, et deux, la loi a vocation a protéger l'individu, non contre lui-même, mais surtout contre d'autres individus. Donc le camp de concentration n'est pas un exemple valable : un individu est menacé par d'autres individus. Idem pour l'inceste, avec un détail de subtilité en plus : la loi vise à protéger la descendance contre les maladies génétiques qui se déclarent en cas de consanguinité (cela dit, ça tombe un peu à plat comme argument : l'inceste est aussi prohibé dans des sociétés où la notion de génétique est inconnue, ou alors il est encouragé dans certaines autres où la fille épouse un homme bien défini, comme une certaine communauté irlandaise ou bien les pharaons égyptiens. Laissons donc l'inceste de côté pour le moment), ou à protéger le foetus contre sa propre mère ceci est l'argument des pro-life, je ne partage pas ce point de vue mais ça ne m'empêche pas de l'énoncer, évitons le débat sur l'avortement s'il-vous-plaît Ensuite, compter sur sa propre force pour résister à la tentation, c'est aller à l'échec : tout à fait, c'est pourquoi on demande au Père ne ne pas nous laisser céder à la tentation. Mais la loi civile n'a, pour moi, pas à entraver la liberté d'agir en conscience, c'était mon idée. Pour ElecScout : il n'y a en effet pas que les douleurs corporelles. En fait, on découvre que certaines douleurs d'origine nerveuse (un dysfonctionnement nerveux organique en est la cause, et non une lésion du corps) se traitent pas trop mal par les antidépresseurs, en mettant à profit un effet secondaire. Mais allez expliquer au patient que vous lui donnez des antidépresseurs parce qu'il a mal... Après, il y a des douleurs plus complexes, liées en général à la perception qu'a le patient de sa maladie. Un patient se sentant très malade et le vivant très mal aura d'autant plus mal, d'où l'importance du travail psychologique. Mais, comme tu dis, on retombe dans les problèmes concrets : formation et présence du personnel soignant... Citation:Oui, j'y ai pensé, mais finalement j'ai pensé qu'inexorable était plus approprié. Et puis bon, on est dans une société où on joue tellement avec la mort, entre l'euthanasie, la réanimation, l'acharnement thérapeutique, que parler de "naturel" à propos de la mort paraît presque incongru... Citation:Jolie précaution oratoire . Mais bon, j'ai envie de te dire de me contredire, au contraire : soit tu te plantes, et je te corrige et tu apprends, soit je me plante, et tu as d'autant plus raison de me contredire, c'est pas parce que je suis étudiant en médecine que je suis infaillible, hein. Pour ce qui est des cas où la douleur est très forte, on peut toujours augmenter la morphine : au pire, notre patient fera des pauses respiratoires, prélude à l'arrêt respiratoire, mais au moins il souffre moins. Et si il doit mourir d'arrêt respiratoire, ça sera toujours moins insupportable pour lui que l'injection de potassium létale (laquelle est très douloureuse). P.S. : Oui, ce post est un peu décousu, ça m'apprendra à poster à 3h du matin et à lire les réponses en vrac et sans ordre. Allez, bonne nuit. |
Dr. Cerf Vincent Cervidé
Nous a rejoints le : 25 Oct 2001 Messages : 5 338 Réside à : Paris |
Citation: Je serais plus nuancé. Ca dépend de ce à quoi le patient est branché. Si la machine remplace une fonction vitale déficiente, ça peut comprendre (respiration, circulation) : sans ça on pourrait maintenir en vie quasiment indéfiniment. S'il s'agit d'arrêter la nutrition d'une personne incapable de se nourrir parce qu'elle est inconsciente, ce n'est plus la même chose. |
Fou de Bassan Membre confirmé
Nous a rejoints le : 11 Mai 2005 Messages : 1 308 Réside à : Le Chesnay |
Et le patient condamné à mourir dans les quelques heures, Gage...As-t-on le droit de lui voler sa mort en accélérant comme par inadvertance la morphine? C'est quelque chose qui arrive tous les jours à l'hôpital, mais qui sont ces médecins qui s'arrogent le droit de décider de la fin d'un autre (inconscient, évidemment)..et qui après demandent lâchement à l'infirmier de s'occuper de la perfusion...
J'ai comme un vague souvenir que le serment d'Hippocrate contient dans son premier article un certain "primum non nocere", il semble malheureusement que ce serment soit passé du coté du folklore et des traditions incomprises. |
Zebre Zebra One
Nous a rejoints le : 19 Oct 2001 Messages : 13 984 Réside à : Lyon |
Citation:Telque c'est dit ici, je suis d'accord. C'est pour cela qu'une loi a distingué entre l'euthanasie, coupable, et l'acharnement thérapeutique à éviter. |
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